Nos vignes et nos vins face au changement climatique

France Inter
Publicité

En 30 ans, la hausse des températures a déjà avancé la date des vendanges, diminué les rendements et transformé les caractéristiques des vins. Quels seront les effets du changement climatiques sur nos vignobles et nos vins d’ici 2050 ? Dans quelle mesure les viticulteurs pourront-ils s'adapter ?

Avec
  • Jean-Marc Touzard Directeur de recherche à l’INRA, économiste spécialiste des innovations pour l’adaptation de l’agriculture au changement climatique

On ne peut pas affirmer que les gelées tardives du début du mois sont liées au changement climatique, mais on peut dire que dans les années à venir les vignes seront plus sensibles à ce type d’évènement car elles bourgeonnent de plus en plus tôt. Et ça, c’est directement lié aux hivers plus doux. En 30 ans, la hausse des températures a avancé la date des vendanges, diminué les rendements et transformé les caractéristiques des vins. Le raisin plus sucré conduit à une plus forte concentration en alcool dans les bouteilles. Depuis 1990, les vins français ont gagné un degré d’alcool par décennie. Parallèlement leur acidité a baissé et les arômes ont évolué. Si rien n’est fait, ces tendances iront en s’accentuant. 

Que faire pour s’adapter et contrecarrer les effets du changement climatique sur la vigne et le vin ?

Publicité

Les chercheurs du projet de l’INRAE, joliment nommé Laccave, planchent sur ces questions depuis une dizaine d’années. Ils testent de nouvelles pratiques agronomiques. Par exemple : modifier la façon de tailler la vigne ou espacer davantage les ceps pourraient aider à résister à la sécheresse.

Autre piste : déplacer les plantations vers des parcelles plus fraiches ou à des altitudes plus clémentes. 

Un gros travail a aussi été entrepris pour identifier de nouveaux cépages plus résistants au manque d’eau, avec une maturité plus tardive et produisant moins de sucre et plus d’acidité. Les scientifiques recherchent ces perles rares parmi des variétés françaises délaissées ou dans les vignobles de pays méditerranéens voisins. Ils travaillent aussi sur de nouvelles variétés obtenues par croisement. 

Ces nouveaux cépages ont déjà fait leur apparition dans les vignobles ?

Certains oui. Il a même fallu faire évoluer le cahier des charges des appellations pour leur faire une place. Une place limitée : ces nouvelles variétés ne doivent pas occuper plus de 5 % des surfaces cultivées, et constituer moins de 10% de l’assemblage des vins.

Quant à nos cépages plus familiers comme le chasselas, le pinot noir ou le chardonnay, ils pourraient se répandre dans des régions plus septentrionales. La Bretagne ou le Nord de la France sont des terres prometteuses en matière de viticulture.  

Selon les chercheurs Nathalie Ollat et Jean-Marc Touzard qui coordonnent le projet Laccave, en 2050, la France produira encore du vin et du bon. Ils sont moins affirmatifs pour 2100. Ça deviendra difficile si le scénario le plus pessimiste des experts du GIEC se réalise avec une élévation de température de plus de 5°C à la fin du siècle. Mais dans ce scénario sombre nous aurons beaucoup d’autres problèmes à affronter, les vignobles seront loin d’être les seuls à trinquer.

L'équipe