Documentaire : Le Pile, laboratoire de politique urbaine à Roubaix

Pendant un an, Ghislaine Buffard a filmé la transformation du quartier du Pile à Roubaix
Pendant un an, Ghislaine Buffard a filmé la transformation du quartier du Pile à Roubaix - Premières Lignes
Pendant un an, Ghislaine Buffard a filmé la transformation du quartier du Pile à Roubaix - Premières Lignes
Pendant un an, Ghislaine Buffard a filmé la transformation du quartier du Pile à Roubaix - Premières Lignes
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Pour revitaliser le quartier du Pile, touché par l’insalubrité et le chômage, la municipalité de Roubaix a mis en vente des maisons à un euro. Le documentaire « Roubaix, la nouvelle face du Pile », diffusé le 7 mai à 23h sur France 3 questionne cette politique de la ville en donnant la parole à ses habitants.

Voilà un documentaire passionnant et très joliment filmé, qui vient mettre de l’humain sur un concept qui peut sembler rasoir et peu concret : la rénovation urbaine. 

Le Pile est l’un des quartiers les plus déshérités de Roubaix, elle-même l’une des villes les plus pauvres de France. Un quartier issu de l’Histoire ouvrière, et sur lequel plane aujourd’hui une atmosphère de ville fantôme. 

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Des dizaines de maisons abandonnées ont été murées pour éviter les squatteurs. Les anciennes filatures sont désertées et le trafic de drogue règne. Depuis quelques années, de vastes travaux ont été lancés : démolition d’une centaine de maisons, réhabilitation et construction de logements neufs, création d’un nouveau parc. Un chantier de grande ampleur pour tenter de voir renaître ce quartier.

Opération "maisons à un euro"

Ce dispositif a été lancé par le maire de Roubaix, le divers droite, Guillaume Delbar. Brader des maisons insalubres : une expérience empruntée à la ville de Liverpool. Les acquéreurs s’engagent à rénover la maison et à y vivre au moins six ans. L’enjeu, c’est bien sûr la mixité sociale : faire venir de nouvelles populations dans ce quartier où un habitant sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté. 

Emilie, architecte, et Romain, commerçant, sont intéressés.

On réhabilite une maison, mais aussi un bout de quartier. On lui redonne vie et c'est chouette de se dire qu'on peut apporter sa pierre à l'édifice.

Seulement voilà, ce couple n’a finalement pas obtenu de crédit bancaire pour se lancer dans les travaux, et a dû renoncer. 

La politique urbaine en question

Le mérite de ce documentaire, c’est de nous plonger dans le quartier sur le long terme. Ghislaine Buffard, la journaliste, a tourné pendant plus d’un an. Elle a pu constater que l’opération « maison à un euro » n’a pas eu le succès escompté, loin de là. Même pour le prix d’une baguette de pain, les classes moyennes sont frileuses à l’idée d’acheter ici. 

Et puis, il y a ceux qui aimeraient partir, vendre leur maison, mais n’y arrivent pas, car la concurrence de ces maisons à un euro a déréglé le marché immobilier : ceux-là sont amers, évidemment. 

Pour aérer les rues de ce quartier très enclavé, iI est aussi prévu de démolir des logements. Résultat, près de cent propriétaires et locataires doivent être expulsés. Comment ne pas être touché par le témoignage de Yolanda ? Elle est arrivée d’Italie à l’âge de treize ans, pour travailler comme ouvrière piqueuse dans une filature. Elle a touché 80 000 euros avant d’être expulsée et relogée, mais les 60 années de sa vie passées dans sa maison au Pile n’ont pas de prix :

Je ne m'habitue pas dans ce nouvel appartement, je déprime. Quand on a appris qu'ils allaient démolir la maison j'ai commencé à prendre des anti-dépresseurs et je continue. Je suis vraiment perdue ici.

Le Pile est un laboratoire inédit de politique de la ville. Mais à quel prix pour les habitants les plus fragiles? Une chose est certaine : le pari de la rénovation sera gagné si ce quartier populaire cesse un jour d’être impopulaire

Roubaix, la nouvelle face du Pile, documentaire de 52 minutes à voir sur France 3 à 23h le jeudi 7 mai, ou en replay dès le lendemain.

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