

L'émission présentée par Elise Lucet sur France 2 lève le voile sur une pratique totalement illégale : dans certaines administrations, des jeunes gens en service civique (indemnisé 580 euros par mois) font un vrai travail et remplacent des fonctionnaires. L'Etat compenserait-il ainsi les réductions d'effectifs ?
Liberté, égalité, rentabilité. L’émission d’Elise Lucet se penche ce jeudi 10 décembre sur les services publics, avec cette question : jusqu’où va l’Etat pour faire des économies ?
Ménage expédié à l'hôpital
La première partie de l’émission concerne l’hôpital, où le nettoyage est souvent sous-traité, confié à une entreprise privée. La journaliste Marie Maurice est parvenue à se faire embaucher comme femme de ménage chez Onet, numéro 1 français du secteur, et a travaillé à l’hôpital de Valenciennes, avant la crise sanitaire. Ses images sont accablantes. Une formation professionnelle expédiée en une journée, un matériel en mauvais état, et surtout des chambres qui sont mal nettoyées par manque de temps, au mépris des protocoles sanitaires. Voilà qui est très préoccupant, en matière de lutte contre les maladies nosocomiales.
Service civique dévoyé
La deuxième partie de ce Cash Investigation est sans doute moins spectaculaire mais tout aussi sidérante. Elle concerne le service civique. Ce dispositif existe depuis dix ans, en France : des jeunes de moins de 26 ans s’engagent dans une association ou dans un service public, entre six mois et un an, et sont indemnisés 580 euros par mois. Cash Investigation lève le voile sur une pratique totalement illégale : les Services Civiques, dans certaines administrations, remplacent des agents et des contractuels. Ils font un vrai boulot, sans le salaire qui va avec et sans obtenir ensuite aucun droit au chômage.
Le constat est particulièrement accablant chez Pôle Emploi. Un ancien Service Civique détaille ce qu’il faisait de ses journées en agence, avec son gilet bleu, et la conclusion est très claire : c’était un job de conseiller.
Une autre journaliste, Manon Bachelot, s’est engagée comme service civique dans une sous-préfecture française. Et là, même chose : ses collègues lui disent sans équivoque qu’elle remplace un fonctionnaire en arrêt maladie. Ce qui m’a le plus frappée, c’est la séquence de démission. Quand, après plusieurs semaines, la journaliste annonce qu’elle arrête à la DRH, cette dernière craque. Elle lui dit que ce n’est pas normal, de faire travailler ainsi des jeunes sous-payés. Elle lui dit qu’elle-même est complètement à bout, qu’elle est tentée de se faire arrêter mais qu’elle ne peut pas car elle sait qu’elle ne sera pas remplacée. Les crédits pour recruter des contractuels ont été supprimés. La détresse de cette fonctionnaire en dit long sur les conséquences concrètes d’une mesure d’économie.
« Cash Investigation », jeudi 10/12/2020 sur France 2 à 21h05.
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