A l'occasion de la 23ème édition du Printemps des Poètes, dont elle est marraine cette année, la comédienne déclame des textes dans la cour d'honneur du palais des papes, à Avignon. Des courts-métrages poétiques à voir d'urgence.
Le printemps a démarré le 13 mars, il se terminera le 29. Pas de panique, Marie-Pierre Planchon : je parle du Printemps des Poètes. Un très beau festival qui chaque année porte haut la poésie, dans toute sa diversité. Thème choisi pour cette 23ème édition : le désir. « Le poème est l’amour réalisé du désir demeuré désir », écrivait René Char.
Courts-métrages poétiques
Cette édition 2021 est singulière, bien sûr, crise sanitaire oblige. Mais des rencontres et des lectures ont bien lieu dans des librairies et des bibliothèques un peu partout en France, avec des jauges réduites. Et puis il y a des rendez-vous en ligne. Là où je suis enthousiaste, c’est que le printemps des poètes ne s’est pas contenté de filmer ce que le public aurait dû voir. On ne remplace pas le spectacle vivant par du spectacle filmé. Ce sont de véritables courts-métrages poétiques qui sont proposés en ligne, gratuitement. Vous y verrez notamment la formidable Marina Hands, de la Comédie Française. Elle est la marraine du printemps des poètes, cette année. Qui mieux que celle qui a sublimé Lady Chaterley au cinéma pour porter ce printemps du désir ? Elle apparait dans trois courts-métrages, tournés dans un décor grandiose : le palais des papes d’Avignon.
La comédienne est seule dans la cour d’honneur, en manteau noir et pantalon bordeaux, sous un soleil radieux. La caméra, très fluide, lui tourne autour, tandis qu’elle déambule. Marina Hands interprète des extraits d’un monologue : « la langue d’Anna ». Un texte lumineux, signé Bernard Noël. C’est Anna Magnani qui parle, ou plutôt qui est censée parler, car sa parole est imaginée par le poète. La grande Anna Magnani, comédienne italienne, vedette des films de Fellini et Visconti.
Se jouer de l’écho
Marina Hands s’adapte à l’écho du palais des papes, elle se joue de la réverbération du son, elle parle aux murs de pierre, elle s’amuse d’un avion qui passe dans le ciel et couvre un temps sa voix. Les mots d’Anna Magnani, tels que le poète Bernard Noël les imagine, ses mots sur le désir et sur le regard des autres sont d’une beauté sidérante.
Dans un autre court-métrage, qui dure une dizaine de minutes, Marina Hands donne la réplique à Gérard Philipe. Oui, cet acteur est mort il y a plus de 60 ans ! Mais c’est un vieil enregistrement sonore qui est diffusé, toujours dans la cour d’honneur du palais des papes. Marina Hands, seule à l’image, lui répond. Ils sont Chimène et Rodrigue. Ils interprètent le Cid, de Corneille. La pièce où l’on trouve une très célèbre litote !
Va, je ne te hais point !
« A vaincre sans péril on triomphe sans gloire », lit-on aussi dans le Cid. Eh bien, il était assurément périlleux de faire ainsi dialoguer un fantôme d’acteur et une actrice en chair et en os. Mais la gloire est au rendez-vous, à mon avis : ces images sont une décharge de beauté, un régal en alexandrins. Je ne vais pas ironiser sur la culture « non-essentielle ». Mais le printemps des poètes vient nous rappeler notre besoin impérieux de poésie, que dis-je, notre désir de poésie.
Courts métrages signés Priscilla Telmon et Mathieu Moon Saura, disponibles gratuitement sur le site du printemps des poètes :
L'équipe
- Production
- Autre