Emmanuel Macron devrait lire l'écrivain Nicolas Mathieu

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Emmanuel Macron devrait lire l'écrivain Nicolas Mathieu - En toute subjectivité
Emmanuel Macron devrait lire l'écrivain Nicolas Mathieu - En toute subjectivité
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A la veille de composer son gouvernement, Emmanuel Macron devrait, selon vous, lire l’écrivain Nicolas Mathieu, prix Goncourt 2018. Pourquoi ?

Car au soir du second tour, Emmanuel Macron s’est montré conscient des fractures françaises

Au moment de composer son gouvernement, il s’interroge forcément sur la manière de réunir les Français et notamment de s’adresser aux classes populaires, qui majoritairement n’ont pas voté pour lui…

Or de livre en livre, Nicolas Mathieu écrit le roman de la France populaire et moyenne, «l’épopée des pavillons et des ronds-points, des ZAC et des villes sans éclat ».

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Macron y trouvera ce que les chiffres et les rapports de Bercy ou de McKinsey ne disent pas : une part de la vérité des hommes…

Le précédent roman de Mathieu, Leurs enfants après eux, tableau d’une vallée marginalisée par la mondialisation, où les hauts-fourneaux ferment, préfigurait la crise des «gilets jaunes».

Son nouveau livre, Connemara publié chez Actes Sud, qui nous plonge dans le quotidien d’une petite ville des Vosges, en Lorraine, continue à scruter le destin des perdants de la mondialisation, mais se penche aussi sur celui des gagnants, en dévoilant notamment l’univers des cabinets de conseil.

Lire Nicolas Mathieu, c’est éprouver les raisons d’autrui…

« Là où la communication segmente, le marketing cible, là où les médias clivent et les identités assignent, la littérature peut tenter d’organiser des circulations entre des mondes qui, dans la vie, sont peut-être plus cloisonnés », explique l’écrivain dans un grand entretien accordé au FigaroVox

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1h 19

Pourtant, dans ce même entretien, Nicolas Mathieu se montre sceptique quant à la réconciliation des France …

Oui, car pour Nicolas Mathieu, « l’objectif n’est pas la fusion» dans laquelle il voit « un déni de la politique ».

Et l’écrivain de fustiger  « le règne universel du tableau Excel. Le fait que la gestion l’emporte sur la politique » : « nous sommes aujourd’hui face à une république des managers » déplore-t-il.

Nicolas Mathieu touche-là les deux principaux écueils du Macronisme :

D’une part, au nom de la recherche nécessaire d’un minimum de cohésion nationale, la tentation de nier tout clivage, d’imposer une forme de pensée et de politique unique, et peut-être demain un parti unique.

D’autre part, la réduction de la politique à un vague pragmatisme technocratique au mépris de l’affrontement fructueux entre plusieurs visions.

Pour revivifier la démocratie, il faut, selon Nicolas Mathieu, au contraire, assumer les clivages …

Oui, Nicolas, l’écrivain refuse la logique de l’extrême-centre

« Organiser des camps en fonction d’intérêts contraires, c’est le propre de la politique. Entre les Gracques et l’aristocratie romaine, c’était déjà la même affaire » , rappelle-t-il.

Selon lui, l’essence même de la démocratie c’est la conflictualité du débat, la capacité à produire des alternatives ou au moins des alternances.

Faute de quoi, le risque est que la démocratie tourne à vide, et que l’enfermement de la politique dans un juste milieu arbitrairement proclamé, amplifie encore la fracture entre les élites et le peuple.

«  Ce qui me semble crucial, c’est le sentiment croissant de pis-aller, d’à quoi bon, l’impression que, sous le barnum, les possibilités sont réduites à rien et que tout est joué d’avance. », résume Nicolas Mathieu.