Alors que la campagne législative débute, la recomposition du paysage politique entamée en 2017 se poursuit…
La renaissance ou la réinvention promise par Emmanuel Macron ressemble davantage à une vaste entreprise de recyclage politique. En face de ce bloc centriste, la droite et la gauche traditionnelles sont en voie de disparition tandis que l’Union populaire de Mélenchon tient du mariage de la carpe et du lapin et que le bloc national divisé reste une opposition stérile. Le second mandat d’Emmanuel Macron débute donc sous le signe d’une profonde crise de la démocratie et il est à prévoir que le grand vainqueur des législatives soit de nouveau l’abstentionnisme… En dynamitant le PS, puis LR, Macron a précipité cette décomposition, mais celle-ci était, en réalité, en germe depuis de longues années.
Vous situez le premier tournant au référendum sur le traité de Maastricht, il y a 30 ans
Oui, le politologue Jérôme Fourquet se souvient encore de sa surprise lorsqu’il découvrit les cartes électorales du scrutin. Ces dernières ne correspondaient en rien aux cartes gauche-droite traditionnelles. Un électorat de gauche et de droite modéré avait voté « Oui » tandis qu’un électorat frontiste et communiste votait «non » . Pour la première fois une France du « Oui » et une France du « non » se dessinaient.
Rétrospectivement, le célèbre discours de Maastricht de Philippe Séguin éclaire également la situation actuelle. Le souverainiste prédisait que l’UE serait le cheval de Troie de la mondialisation marchande et technocratique. Il affirmait que le transfert d’une grande partie du pouvoir politique national, vers des institutions et des juridictions supranationales non élues, serait vécu par les peuples comme une dépossession. Et déboucherait sur une impasse démocratique et une montée des extrêmes.
Toute une oligarchie d'experts, de juges, de fonctionnaires, de gouvernants prend, au nom des peuples, sans en avoir reçu mandat, des décisions dont une formidable conspiration du silence dissimule les enjeux et minimise les conséquences, expliquait-il le 5 mai 1992 devant l’Assemblée nationale, avant de prophétiser... c'est lorsque le sentiment national est bafoué que la voie s'ouvre aux dérives nationalistes et à tous les extrémismes ! » Séguin annonçait également que « la droite et la gauche ne seraient plus que deux détaillants se fournissant au même grossiste : l’Europe », soit la définition à peu près exacte de l’extrême centre macaroniste
Emmanuel Macron s'est justement prononcé en faveur d'une révision des traités européens et d'un abandon du vote à l'unanimité des États-membres sur les questions stratégiques
Une prise de décision à la majorité qualifiée serait un nouveau pas vers le fédéralisme. Au risque pour nos gouvernements futurs de se voir dicter des décisions politiques qu’ils ne souhaitent pas et d’amplifier ainsi la frustration démocratique et la révolte nationaliste annoncée par Séguin. Comme François Mitterrand et Jacques Chirac en leur temps, Emmanuel Macron semble choisir, pour son second mandat, la fuite en avant européenne. Comme ces prédécesseurs, Macron aura-t-il l’audace de consulter les Français ?
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