Des champignons inclusifs

Fabien Simon, déficient visuel, prend soin des champignons produits par le Bunker Comestible de C'Cité
Fabien Simon, déficient visuel, prend soin des champignons produits par le Bunker Comestible de C'Cité ©Radio France - Lionel Thompson
Fabien Simon, déficient visuel, prend soin des champignons produits par le Bunker Comestible de C'Cité ©Radio France - Lionel Thompson
Fabien Simon, déficient visuel, prend soin des champignons produits par le Bunker Comestible de C'Cité ©Radio France - Lionel Thompson
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On l'a déjà dit ici : trouver un emploi reste très difficile pour les personnes handicapées. La Fédération des aveugles d'Alsace Lorraine Grand Est, C'Cité, développe des activités originales à Strasbourg, dont un atelier de culture de champignons.

Pour découvrir cet atelier, Fabien Simon, le vice-président de C'Cité, nous a donné rendez-vous au pied des anciens remparts de la ville, derrière la gare. Il nous ouvre une lourde porte en fer portant la mention "Interdiction de fumer" et nous fait entrer dans un lieu insolite.

"C'est un ancien bunker de la première guerre mondiale qui servait de dépôt de munitions, une ancienne poudrière de l'armée allemande"

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L'espace ressemble à une vaste cave, tout en voutes et en briques, un endroit qui semble idéal pour faire pousser des champignons.

"Ça ne convient pas à toutes les sortes de champignons mais pour certaines catégories, oui, parce que l'hygrométrie y est constante et la température aussi, que ce soit été ou hiver."

C'est parfait pour les pleurotes et les shiitakes qui poussent ici, en fait. Fabien Simon, déficient visuel depuis la naissance, est le chef de cet atelier rebaptisé "Bunker comestible". Avec deux autres personnes mal-voyantes, formés par un maraîcher, ils viennent deux à trois fois par semaine surveiller la pousse et récolter jusqu'à une centaine de kilos de champignons. Les lieux ont juste été un peu adaptés au handicap des cultivateurs.

"Quand on a repris la champignonnière, il y a à peu près deux ans, on a fait les adaptations pour. C'est à dire qu'on a enlevé tout ce qui était obstacle qui trainait dans le chemin. On a amélioré aussi tout ce qui est éclairage et luminosité."

Fabien Simon nous montre les magnifiques pleurotes qui se dressent sur les ballots de culture alignés dans la pièce. Il les préfère aux shiitakés, qu'il faut faire cuire un peu plus longuement, nous précise-t-il. Ces pleurotes-là sont prêtes à être récoltées, tandis que dans la chambre froide les récoltes précédentes sont entreposées dans des cagettes en attendant d'être expédiées chez des restaurateurs locaux.

Diversifier les activités

Des magasins Biocoop achètent aussi cette production bio et C'Cité cherche d'autres clients potentiels. Le but, au-delà de la rentabilité encore incertaine, est de servir de tremplin vers l'emploi.

"C'est une activité complémentaire. Parce qu'à la Fédération, on fait beaucoup d'autres choses. Nous vendons du matériel de bureautique, nous fabriquons des balais artisanaux, nous réparons des chaises... Donc, ça, c'est vraiment un complément. On a essayé de se diversifier pour montrer aux personnes voyantes et au monde extérieur qu'un déficient visuel ou un aveugle peuvent faire différentes choses."

Dans le même ordre d'idée, C'Cité s'est doté à Strasbourg d'une cuisine connectée, adaptée aux personnes aveugles ou déficientes visuelles, et compte ouvrir d'ici peu un café-épicerie, baptisé Le Licht, la lumière en Allemand, qui pourra aussi vendre les champignons du Bunker Comestible.

"Le but sera plutôt de transformer ces champignons pour les vendre. L'idée de toutes nos activités, c'est d'amener les déficients visuels à travailler dans un milieu ordinaire, quel que soit le métier. Aujourd'hui, il y a de 60% à 70% de personnes déficientes visuelles qui cherchent du travail."

Pour toutes ces initiatives, C'Cité a reçu cette année le prix "Utilité sociale" remis par l'organisme Économie Sociale et Solidaire (ESS) France.