

Près de 140 millions de livres neufs passent au pilon tous les ans en France, emportés par la surproduction éditoriale. La plateforme internet My Fair Book entend donner une seconde chance à certains de ces livres.
Julie Rovero travaillait déjà dans l'édition. Patricia Farnier, elle, vient du monde de l'audit. Ce qui a réuni ces deux cofondatrices de My Fair Book aux parcours différents, au delà de leur amour de la littérature, c'est un constat commun.
Julie Rovero : "Je travaillais chez un éditeur indépendant. On défendait des livres et on avait la tristesse de constater qu'ils restaient de moins en moins longtemps en librairie, à cause d'une surproduction évidente. On a eu envie de trouver une solution pour prolonger la vie de ces livres, plutôt que de les passer au pilon, puisqu'un quart de la production française est détruite chaque année."
Cette destruction est en quelque sorte encouragée puisqu'elle est gratuite pour les éditeurs, qui n'ont pas à en supporter le coût.
La solution, c'est donc une plateforme internet, My Fair Book, qui propose une sélection de romans approuvés par un comité de lecture d'une dizaine de personnes : libraires, auteurs, journalistes ou grands lecteurs, tous passionnés de littérature. Le site est pensé comme une table de libraire en ligne, avec de brefs textes prescripteurs pour présenter ces ouvrages qui méritent bien mieux que le pilon auquel ils étaient destinés.
Patricia Farnier : "Par exemple Bamboo song, de Louis-Ferdinand Despreez, aux Éditions du Canoë. C'est un roman d'aventure à la fois poétique et ironique. On suit un ֤Éthiopien qui part au moment de l'invasion de son pays par Mussolini au Laos, pour essayer de trouver le soutien du roi du Laos. C'est absolument passionnant, très, très original et c'est un vrai coup de cœur !"
Julie Rovero : Il faut comprendre qu'un auteur met souvent presqu'un an à écrire un livre, que derrière il y a un travail d'éditeur, qui peut prendre plusieurs mois. Quand le livre ne reste qu'un ou deux mois en librairie... C'est très dur !"
Favoriser la biblio diversité
C'est très dur et c'est un véritable gâchis, surtout quand le livre est bon. Prolonger la vie de ces romans est une forme d'économie circulaire, qui favorise la biblio diversité, disent les fondatrices, en donnant une seconde chance à ces livres dans un marché écrasé par les best-sellers.
Cela permet aussi de prolonger les droits d'auteurs. Les ouvrages sont vendus au prix du neuf, puisqu'il ne s'agit pas d'occasion. C'est une offre qui peut notamment séduire quand on est loin d'une librairie.
Julie Rovero : "À Paris et dans les grandes villes on a la chance d'avoir des librairies mais il y a vraiment des coins de France où il y en a beaucoup moins. On a pensé aussi aux expatriés ou aux étrangers francophones. Parce que, toutes les deux, on a habité à l'étranger et on a vu que c'était compliqué de se procurer des livres en langue française."
My Fair Book espère aussi sauver des livres en favorisant le don à des associations.
Julie Rovero : "On ne va pas sauver à nous seuls le quart de la production qui est pilonnée, ça c'est sûr ! Mais on essaie, à notre échelle, d'être acteurs contre ce gaspillage et on va se rapprocher d'associations qui œuvrent pour l'accès à la lecture, pour favoriser les dons de nos éditeurs en leur faveur."
Huit éditeurs indépendants travaillent déjà avec My Fair Book. Julie Rovero et Patricia Farnier comptent bien élargir leur catalogue et pouvoir proposer à l'avenir d'autres formes de publications : romans jeunesse, romans graphiques ou essais.
Pour aller plus loin :
Les chiffres clés du marché du livre en France sur le site du ministère de la Culture.
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