La signature aujourd’hui à Washington des accords entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahrein suscitent des réactions diverses, à la fois en raison de l’ombre de Donald Trump et de l’« oubli » de la question palestinienne.
Il y a plusieurs manières d’analyser la signature, aujourd’hui à la Maison Blanche, des accords entre Israël, les Émirats arabes unis et le Royaume de Bahrein ; des visions contradictoires qui résument l’état d’un Moyen Orient en pleine mutation. Certains l’observeront avec une bonne dose de cynisme, d’autres seront au contraire pleins d’optimisme, et d’autres enfin, se contenteront d’un regard lucide, sans illusions.
Les cyniques n’auront pas à chercher loin pour voir qu’une cérémonie à caractère historique à la Maison Blanche, à six semaines d’une élection présidentielle dans laquelle le président sortant se représente, constitue une opportunité de choix. De quoi satisfaire en particulier la base évangélique de Donald Trump, très pro-israélienne
Le président a voulu ces accords de paix, comme il a voulu cette photo à la Maison Blanche qui en évoque une autre, celle de Bill Clinton avec le Palestinien Yasser Arafat et les Israéliens Yitzhak Rabin et Shimon Pérès en 1993, qui a valu aux trois hommes le prix Nobel de la paix.
La poignée de mains de Benyamin Netanyahou avec les dirigeants du Golfe n’a pas la même portée historique, mais on peut compter sur Donald Trump pour proclamer que personne n’en a fait autant que lui pour la paix au Moyen Orient, et sur ses partisans pour réclamer que lui soit attribué le prix Nobel de la paix, comme un certain… Barack Obama.
Mais ça n’est pas toute l’histoire, et c’est là que les optimistes entrent en scène. Ils y verront une nouvelle étape dans l’acceptation d’Israël dans la région, plus de soixante-dix ans après la naissance de l’État hébreu. Les Émirats et Bahrein rejoignent deux autres États arabes, seulement, qui ont reconnu Israël, l’Égypte et la Jordanie.
D’autres pourraient suivre, poussés par l’administration américaine, à commencer par l’Arabie saoudite, gardienne des lieux saints de l’Islam et devenue la principale puissance sunnite après l’éclipse égyptienne. Pour l’instant, le vieux roi Salman ne veut pas franchir le pas tant qu’Israël n’accepte pas le plan de paix avec les Palestiniens que Ryad avait proposé en 2002. Pas sûr que le prince héritier, Mohamed Ben Salman, qui attend son heure, ait de telles réserves…
La logique qui prévaut dans ce retournement progressif des États du Golfe est évidemment dictée par un ennemi commun, l’Iran, qui les pousse à s’allier à la seule autre puissance régionale ouvertement hostile à Téhéran, Israël. On connait l’adage, les ennemis de mes ennemis, etc…
Reste la troisième catégorie, les lucides sans illusions ; ceux qui observent ce jeu des alliances et des axes, en constatant que si l’équation géopolitique de la région bouge, il y a une grande oubliée : la question palestinienne. Ils n’en sont pas surpris, car les pays du Golfe n’ont jamais été les plus concernés par le sort des Palestiniens.
Officiellement, les accords de paix avec les Émirats et Bahrein ont permis de repousser la menace d’annexion d’une partie de la Cisjordanie par l’État d’Israël. Mais le vrai problème des Palestiniens, c’est l’annexion rampante, par le biais de la colonisation qui ne s’est jamais arrêtée, et qui empêcherait, même si les conditions politiques existaient, la solution à deux États.
Il est clairement plus facile à Israël de faire la paix avec Abu Dhabi ou Manama qu’avec Ramallah ou Gaza.
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