Alors que l’université Polytechnique de Hong Kong est encerclée par la police avec le dernier carré d’étudiants irréductibles retranché à l’intérieur, le gouvernement chinois recommande la ligne dure.
Il y a des choses qui ne changent pas en Chine. Le 26 avril 1989, un éditorial à la une du Quotidien du Peuple de Pékin, l’organe central du Parti communiste, indiquait clairement que la ligne dure l’avait emporté face au mouvement étudiant pro-démocratie de la Place Tiananmen. Cinq semaines plus tard, le 4 juin, l’armée écrasait le Printemps de Pékin dans le sang.
Hier, le Quotidien du Peuple a publié un autre éditorial, dans la même veine, affirmant qu’« aucun compromis n’est possible » avec la jeunesse révoltée de Hong Kong. Du Brésil où il était en visite, le numéro un chinois Xi Jinping avait déclaré jeudi dernier que « le rétablissement de l’ordre à Hong Kong était la tâche la plus urgente ».
La méthode sera sans doute différente de celle de 1989, ça reste à voir, mais le message est le même : tout défi à l’autorité du Parti communiste chinois sera écrasé. Même si, dans les deux cas, c’est une génération entière qui en paiera le prix.
La bataille de l’université polytechnique de Hong Kong, qui se déroule depuis trois jours, constitue le paroxysme de la violence en six mois de mouvement dans l’ancienne colonie britannique.
Le dernier carré d’étudiants retranché dans le campus en a fait son « Stalingrad », avec des arcs et des flèches, des catapultes lanceuses de cocktails Molotov et autres armes de fortune. Ils se sentent investis d’une mission historique : ils pensent que s’ils cèdent aujourd’hui, le rouleau compresseur totalitaire avalera Hong Kong et ce qui reste de leurs libertés, garanties par l’autonomie du territoire.
Les forces de l’ordre sont pour leur part en roue libre, usant d’une force disproportionnée pour capturer les « rebelles », même lorsqu’ils sont désireux d’évacuer le campus. Un député démocrate qui a tenté une médiation a raconté avoir été couvert d’insultes par des policiers survoltés. Le message de la police : seule une reddition est possible.
Les scènes de guerrilla urbaine auxquelles on assiste sont le résultat de six mois d’absence de dialogue, d’inertie coupable de la cheffe de l’exécutif, Carrie Lam, et de radicalisation d’un mouvement qui n’était pas violent au début.
Un sondage ce weekend montrait qu’une majorité de Hongkongais soutenait toujours le mouvement, malgré les violences, les excès, les dérapages.
A voir la solidarité qui s’exprime dans la rue vis-à-vis des jeunes rebelles, il semble qu’une bonne partie des Hongkongais fasse porter la responsabilité de la violence à la police et au gouvernement local, même si les jeunes ont fait le choix de répondre par leur propre violence, par bien des aspects suicidaire.
Dimanche prochain, des élections locales sont prévues à Hong Kong, qui, si elles se tiennent, donneront une idée précise de l’état de l’opinion. Si elles se tiennent, car les autorités ont évoqué la possibilité de les annuler dans le climat actuel : ce serait une erreur ça renforcerait l’image autoritaire du pouvoir à un moment où le dialogue est plus que jamais nécessaire. Mais ce n’est pas le mot d’ordre venu de Pékin : aucun compromis.
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