où l'on voit un débat présidentiel devenir paroissial
Ce ne fut pas un débat indigne, bien au contraire, mais un regret, profond et essentiel. Si ces candidats à la présidence de la République française avaient commencé par débattre de l’état du monde et de l’Europe au lieu de finir par cela, pressés par le temps et allant bien trop vite sur des sujets si déterminants, sans doute aurait-on mieux vu ce qu’il y avait de possible et d’impossible, de crédible et de vain, dans leurs propositions.
Avant de débattre de ce que l’on fera demain, il fallait savoir dans quel cadre on le ferait, dans l’Union ou la désunion, dans le protectionnisme ou le libre-échange, avec un effort de Défense commun ou un budget militaire dont la France serait seule à supporter le développement. Avant de l’avoir déterminé, on ne peut pas parler de ce qui serait réalisable à l’intérieur des frontières et c’est pourtant ce qui s’est fait hier.
Bon… C’est ainsi et, sur ces sujets internationaux et européens, il y eut pourtant des moments forts. François Fillon, énumère les menaces pesant sur la France et l’Europe, incertitudes américaines, terrorisme islamiste, puissance économique de la Chine et… Eh bien non, pas Vladimir Poutine, pas un mot, rien d’un homme qui est le premier dans l’Europe d’après-guerre à avoir annexé un territoire appartenant à un autre Etat dans lequel il entretient de surcroît un mouvement sécessionniste armé.
Jean-Luc Mélenchon propose maintenant de sortir de l’Otan, faisant l’impasse sur le fait que l’Otan n’est plus l’instrument d’une domination politique américaine sur l’Europe, que les Etats-Unis s’en détournent au contraire au profit du renforcement de leur présence en Asie et que M.Trump ne veut plus financer cette alliance sur laquelle il réclame même des arriérés de paiement à l’Allemagne.
Troisième moment, tout aussi frappant : Marine Le Pen affirme ne pas vouloir être, si elle était élue, la vice-chancelière de Mme Merkel.
C’était dire que la France serait sous domination allemande et oublier que, si c’était le cas, la Grèce aurait été expulsée de la zone euro, ce que voulait l’Allemagne et ce à quoi s’est opposée la France, qu’il n’y aurait pas eu d’intervention au Mali, pas d’Union bancaire, pas de fonds européen de solidarité financière et pas non plus d’accommodements sur le respect des critères de Maastricht dont la France, à tort ou à raison et comme bien d’autres d’ailleurs, s’affranchit depuis un nombre d’années très conséquent.
Et puis deux autres moments encore. La force et la conviction, d’abord, avec lesquelles Benoît Hamon, candidat socialiste venu de la gauche socialiste, a plaidé pour l’augmentation des dépenses militaires et le maintien de toutes les capacités françaises au service d’une Défense européenne qu’impose le retrait américain. Et enfin cette interjection de François Fillon lançant ironiquement : « Parce que vous voyez la colère sociale monter en Allemagne ? ». Personne n’a relevé mais si, elle monte et si fort que la gauche allemande menace aujourd’hui la réélection de Mme Merkel.
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