

Le Président va célébrer le centenaire de la naissance du pays, mais surtout pousser aux réformes attendues par les pays qui sont prêts à aider le Liban à sortir de sa crise. La nomination d’un nouveau premier ministre est destinée à lui montrer que les choses bougent.
Comme il l’avait promis lors de sa première visite le 6 août, 48 heures après la terrible explosion du port de Beyrouth, Emmanuel Macron y retourne ce soir pour célébrer le centenaire de la naissance du Liban. Mais pour montrer qu’il va à la rencontre du Liban et pas seulement de ses dirigeants honnis, il entame sa visite par une soirée avec la grande chanteuse libanaise Fairouz, dans sa résidence de la montagne.
Aujourd’hui âgée de 85 ans, Fairouz avait marqué par un concert historique la renaissance de Beyrouth après la guerre civile qui a pris fin en 1990. C’est ce symbole qu’Emmanuel Macron va chercher auprès de la diva libanaise, au moment où le pays et sa capitale sont plongés dans une nouvelle crise existentielle, qui touche tous les secteurs, humanitaire, économique, politique, social, moral.
Le 6 août, on s’en souvient, Emmanuel Macron avait dit tout haut ce que de très nombreux Libanais crient dans la rue depuis octobre dernier, un rejet clair et massif de la classe politique qui a fait du Liban une économie de rente depuis trente ans. Il avait appelé à un nouveau « Pacte national », et mis la pression sur les actuels dirigeants. Depuis son départ, rien n’avait bougé, jusqu’à ces dernières heures, avec un consensus politique autour d’un nouveau premier ministre, l’actuel ambassadeur en Allemagne, Mustapha Adib.
Ce qui a fait bouger les positions, c’est le fait que le Président français exprime la position des pays et institutions qui sont prêts à aider le Liban hors de cette ornière - à condition qu’il se réforme.
Vendredi, à l’Élysée, on disait « mettre la pression » en réclamant un « gouvernement de mission », c’est-à-dire capable d’accomplir les réformes que tout le monde connait, du système bancaire, des douanes, de l’électricité, de la santé.
La nomination attendue aujourd’hui de ce juriste-diplomate répond-elle à cette attente ? Ca semble peu probable même si Mustapha Adib n’est pas du sérail politique.
On touche là à la contradiction majeure de la démarche d’Emmanuel Macron : il demande à la classe politique de faire un « pas de côté » ; mais c’est demander aux clans politiques de se suicider, ce qu’aucun n’est prêt à faire, à commencer évidemment par le Hezbollah pro-iranien.
Il va se retrouver devant des hommes politiques qui vont lui dire, la main sur le cœur, qu’ils sont pour les réformes. Et il devra évaluer l’annonce hier soir par le Président Michel Aoun de pas en direction de la « laïcité », et même le soutien du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, à son idée de nouveau Pacte national. Ce n’est pas rien.
Mais les Libanais n’ont aucune confiance dans la capacité de cette classe politique à se réformer et ils espèrent que la France maintiendra la pression.
Avant cette visite, Emmanuel Macron a publiquement évoqué un risque de nouvelle guerre civile, ou même de disparition du Liban. Mais il va d’abord se ressourcer auprès de la grande Fairouz, dont la voix a chanté « Beirut » lors d’une de ses nombreuses renaissances. Laissons-lui le dernier mot…
« Ma ville a éteint ses lumières
Elle a fermé sa porte, elle est restée, le soir, toute seule,
Toute seule la nuit
A Beyrouth
De mon cœur un salut à Beyrouth
Et des baisers à la mer et aux maisons ».
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