Poutine s’acharne sur Navalny pour empêcher toute contestation de la guerre en Ukraine

Alexei Navalny, en tenue de sa colonie pénitentiaire (au centre) hier, au cours de son procès en visioconférence, officiellement pour cause de covid.
Alexei Navalny, en tenue de sa colonie pénitentiaire (au centre) hier, au cours de son procès en visioconférence, officiellement pour cause de covid. ©AFP - AFP
Alexei Navalny, en tenue de sa colonie pénitentiaire (au centre) hier, au cours de son procès en visioconférence, officiellement pour cause de covid. ©AFP - AFP
Alexei Navalny, en tenue de sa colonie pénitentiaire (au centre) hier, au cours de son procès en visioconférence, officiellement pour cause de covid. ©AFP - AFP
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L’opposant numéro un à Vladimir Poutine a été condamné à 9 ans de camp qui s’ajoutent à la peine de deux ans et demi qu’il purge actuellement. Navalny s’oppose à la guerre en Ukraine, mais il croupit en prison et ses partisans sont muselés.

En pleine guerre d’Ukraine, la machine répressive tourne à plein régime en Russie. Rien qu’hier, la Cour suprême russe a confirmé la dissolution de l’Association Memorial dédiée à la mémoire des crimes du Stalinisme. Le Parlement a adopté une loi prévoyant de lourdes sanctions pour toute "information mensongère" sur l’action de Moscou à l’étranger ; et enfin, l’opposant Alexeï Navalny a été condamné à neuf années de camp qui s’ajoutent à la peine de deux ans et demi de prison qu’il purge actuellement. À la sortie du tribunal, ses deux avocats ont été arrêtés - tenez-vous bien ! - parce qu’ils gênaient la circulation.

Cette avalanche répressive est destinée à empêcher toute contestation de l’invasion de l’Ukraine, dont la grande majorité des Russes ne connait qu’une version édulcorée : une "opération militaire spéciale" contre les "nazis" qui contrôlent l’Ukraine, tout se déroule selon les plans. La plupart des médias indépendants ont été fermés, Facebook, Twitter et Instagram sont interdits comme organisations "extrémistes".

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Alexei Navalny fait l’objet d’un traitement particulier. Il a une longue histoire de confrontation avec le pouvoir russe, et n’est pas près de recouvrer la liberté, du moins tant que Poutine sera au Kremlin.

Navalny avait fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille, et ça lui avait valu une tentative d’empoisonnement au Novichok, un emprisonnement à son retour de convalescence en Allemagne, la dissolution de son organisation. Et ce n’est pas terminé…

La vindicte officielle est d’autant plus forte que la Fondation de Navalny, aujourd’hui dissoute, a fourni à l’Union européenne une liste de 35 oligarques proches du Kremlin au cœur du système d’enrichissement, disposant d’avoirs de plusieurs dizaines de milliards d’euros à l’étranger. Toutes, sauf une, sont aujourd’hui la cible des sanctions internationales.

Lundi, le consortium des Journalistes d’investigation a publié de nouvelle révélations sur ces oligarques, et sur le système d’enrichissement de l’élite russe, y compris le Président lui-même.

Circonstance aggravante, depuis, sa prison, Navalny a pris position contre la guerre en Ukraine, appelant ses partisans à manifester dès les premiers jours. Plus de 10 000 personnes ont été interpelées lors de ces manifestations, qui ne sont plus possibles aujourd’hui. Une vidéo tournée à Moscou montre l’interpellation en quelques secondes d’une jeune femme brandissant une pancarte blanche, sans le moindre mot.

Vladimir Poutine s’en est pris la semaine dernière à la « cinquième colonne », ces « ennemis de l’intérieur », qu’il entend combattre sans merci. Navalny est le premier d’entre eux. Le contrôle de la société, alors que la guerre aurait déjà fait près de 10 000 soldats russes tués, et que les sanctions commencent à mordre, est un enjeu majeur pour Poutine.

À son procès hier, Navalny voulait citer Léon Tolstoï, il en a été empêché. Pour le grand écrivain russe, "La guerre est l'œuvre du despotisme. Ceux qui veulent combattre la guerre doivent seulement combattre le despotisme". Message subversif s’il en est, dans la Russie de 2022.