

Presque tous les chefs d'Etat africains sont réunis pour deux jours à Pékin pour un sommet sino-africain qui reflète la montée de l'influence chinoise sur le continent.
C’est l’une des évolutions majeures de la dernière décennie, dont nous n’avons pas totalement mesuré la portée. La Chine est devenue le premier partenaire du continent africain : le pays le plus peuplé au monde rencontre le continent-clé du 21ème siècle.
Pendant deux jours, le Président chinois Xi Jinping a reçu à Pékin plusieurs dizaines de chefs d’Etat africains, un privilège qui était autrefois l’apanage des présidents français.
Il y a certes une incitation sonnante et trébuchante à cette réunion : Xi Jinping a annoncé hier une nouvelle contribution de 60 milliards de dollars de la Chine au développement de l’Afrique, dont 15 milliards sous forme de dons ou de prêts sans intérêt, la même somme qu’au précédent sommet il y a trois ans. Mais on aurait tort de n’y voir qu’une diplomatie du carnet de chèque.
La Chine post-maoïste a commencé à s’intéresser au continent africain dans les années 2000, lorsque son développement rapide a eu besoin de plus en plus de matières premières. Les premiers déplacements de dirigeants chinois pouvaient être suivis à la trace : une étape pour le pétrole, une pour le cuivre, une troisième pour l’uranium…
Depuis, Pékin a développé une véritable stratégie africaine, relais de croissance et de puissance dans un monde redevenu celui des rapports de force et des sphères d’influence. Et pendant que Donald Trump ignore ou méprise l’Afrique, Xi la courtise et en fait des partenaires.
L’Afrique toute entière est désormais incluse la nouvelle « route de la soie » chinoise, le financement de grands travaux d’infrastructures. La Chine a ainsi construit une voie ferrée entre la capitale éthiopienne, Addis Abeba, et le port de Djibouti, qui remplace –le symbole est fort-, une ligne précédente construite par les Français au début du 20ème siècle.
L’ancienne colonie française de Djibouti abrite d’ailleurs la première base militaire chinoise hors de Chine.
A travers tout le continent, les Instituts Confucius, ces écoles de langues financées par Pékin, ne désemplissent pas, signe d’une relation qui va au-delà des gros contrats.
Pékin s’offre en fait en alternative aux anciennes puissances coloniales défaillantes ou aux États-Unis dont le désintérêt pour l’Afrique a été grossièrement signifié par Donald Trump lorsqu’il a parlé de « pays de merde » (« shitholes »).
La Chine a longtemps eu la puissance modeste. Avec Xi Jinping, elle promeut désormais un modèle de capitalisme autoritaire capable de sortir des centaines de millions de personnes de la misère ; De quoi séduire un continent encore en développement.
Il y a évidemment un revers de la médaille, à commencer par le piège de la dette qui menace déjà plusieurs pays d’Afrique par trop liés à Pékin. Et si, officiellement, il n’y a pas de conditionnalité politique à l’aide chinoise, il y a assurément un clientélisme peu regardant en matière de droits de l’homme.
L’influence chinoise en Afrique est devenue un fait géopolitique majeur. Mais si la Chine est aussi forte en Afrique, c’est d’abord parce que nous n’avons pas su nouer, avec ce continent, des relations postcoloniales équitables et durables. Peut-être est-il temps de changer notre regard sur l’Afrique, avant de découvrir qu’elle s’est bel et bien choisie de nouveaux amis.
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