L'Allemagne, honneur de l'Europe

France Inter
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Pourquoi l’Allemagne ? Pourquoi l’Allemagne est-elle pratiquement le seul pays d’Europe où l’afflux des réfugiés ne provoque pas l’effroi, où la plus haute autorité de l’Etat, Mme Merkel, en appelle à la solidarité du genre humain envers ces malheureux et à la solidarité européenne dans la gestion de cette crise et où trois grands journaux - dont Bild, puissant quotidien conservateur et populaire - prônent, jour après jour, l’accueil et la compassion ?

La raison en est, répondent les plus cyniques, que l’Allemagne ne fait pas assez d’enfants, qu’elle connaîtra, sous vingt ans, un sévère déficit démographique et que son économie aura très bientôt besoin de bras. Oui… Cela joue sans doute dans les milieux patronaux mais pas dans la population entière et la République fédérale n’est pas seule en Europe, bien au contraire, à avoir une trop basse natalité. L’explication par la démographie ne tient pas et la vraie raison de cette exception allemande est que ce pays est assez fort, pragmatique et consensuel pour n’être pas en permanence rongé par ces peurs de tout et ces surenchères des nouvelles extrêmes-droites qui minent tant d’autres des Etats de l’Union, la France au premier chef.

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Là-bas, pas de déclinistes pour annoncer chaque matin que nous serions irrémédiablement fichus, pas de démagogues, non plus, pour dénoncer jour et nuit la prétendue trahison des élites intellectuelles et politiques. L’Allemagne est sûre d’elle-même et c’est ce qui permet à Mme Merkel de sauver l’honneur de l’Europe en disant que ce n’est, bien sûr, pas facile mais qu’une Union de plus de 500 millions de personnes, constituant la deuxième économie du monde, peut parfaitement faire face à ce drame, ne pas en détourner ses regards et ne pas dresser des murs de barbelés contre des familles fuyant la mort, hagardes, désespérées et traitées comme une nouvelle peste.

L’Europe ne peut pas accueillir toute la misère du monde mais elle peut et devrait en prendre sa part en faisant le tri entre ceux qui la gagnent pour échapper à la misère et ceux pour lesquels c’est l’Europe ou la mort. Elle doit, pour cela, renforcer ses frontières communes, se doter de critères communs et se donner les moyens de faire ce tri. Elle doit, en un mot, cesser d’avoir peur et se montrer à la hauteur de ses principes et de sa force car, enfin, que craignons-nous ?

D’être envahis par des terroristes en puissance alors que ces misérables fuient la terreur ? De voir augmenter le chômage alors même qu’il y a des millions d’emplois difficiles dont les Européens ne veulent pas et que ces affamés seraient trop heureux de prendre en payant des impôts et des cotisations sociales qui viendraient réduire nos déficits et relancer nos économies ?

Si nous avons oublié la charité, soyons au moins conscients de nos intérêts et cessons, surtout, de croire que l’islam serait en lui-même un danger alors que ces musulmans rêvant d’Europe et issus, pour la plupart, des classes moyennes sont nos alliés - nos alliés contre les barbares et les potentats qui les persécutent pour la seule raison qu’ils croient, eux, en ces valeurs dont nous nous réclamons.

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