Sur le fond, on peut en discuter mais, sur la forme, quel changement et quel progrès ! Hier, le jour même où il prenait ses nouvelles fonctions de président du Conseil européen, l’ancien Premier ministre polonais Donald Tusk a parlé et agi en président de l’Union, non pas en simple facilitateur des réunions des 28 chefs d’Etat et de gouvernements, mais en porte-parole et incarnation d’un acteur de la scène internationale nommé l’Union européenne.
Il a d’abord décroché son téléphone pour appeler Barack Obama et se faire, par là même, son interlocuteur et égal. Entre… Eh bien oui, disons-le, entre les deux présidents, le principal sujet de conversation a été l’Ukraine à propos de laquelle ils sont convenus qu’il était « important » que la Russie retire ses troupes des provinces orientales aux mains des séparatistes et que l’Union et les Etats-Unis continuent de coordonner leurs sanctions contre Moscou et d’apporter une aide financière aux Ukrainiens.
Aucune capitale européenne ne trouvera là rien à redire. C’est la position des 28 qu’exprimait hier Donald Tusk mais tous n’apprécieront peut-être pas que le nouveau président du Conseil ait établi un contact direct avec la Maison-Blanche, qu’il ait ainsi rehaussé sa fonction en diminuant leur rôle, et ce n’est pas tout. Donald Tusk est également convenu avec Barack Obama de « renforcer davantage les liens entre l’Union européenne et l’Otan ». La formulation était suffisamment générale pour ne rien induire de nouveau mais beaucoup des Européens, des gouvernements et des citoyens de l’Union, auraient sans doute préféré entendre parler du développement d’une Défense européenne dont les Polonais sont, au demeurant, les plus chauds partisans dans l’Union.
Des dents vont grincer mais le fait est que Donald Tusk vient de prendre l’initiative de démentir l’ancien secrétaire d’Etat américain Henry Kissinger qui avait un jour demandé : « L’Europe ? Quel numéro de téléphone ? ». L’Union en a désormais un et c’est bien, beaucoup mieux que ce non-être politique dont elle ne s’était pas, jusqu’à présent, décidée à sortir, d’autant mieux que Donald Tusk s’est, par ailleurs, dit décidé à exercer son mandat avec fermeté et à combattre la crise économique européenne avec « une inexorable détermination ».
Le président de la Commission investit 300 milliards dans la croissance. Le président du Conseil veut faire exister l’Union. Les choses bougent décidément en Europe où la France, l’Allemagne et l’Italie viennent, de surcroît, de demander ensemble à la Commission une directive européenne, une loi de l’Union, contre le dumping fiscal entre Etats membres. Si elles sont entendues, et elles devraient l’être, c’est un scandale majeur auquel il serait mis terme et un grand pas, surtout, qui serait enfin fait vers l’harmonisation fiscale.
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