La bataille de l'après Daesh

France Inter
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Abou Mohammed al-Adnani était le numéro deux de Daesh.

Les services occidentaux l’avaient surnommé le « ministre des attentats » car il était le commanditaire et le propagandiste des tueries de l’Etat islamique, notamment de celles qui ont visé la France à laquelle il vouait une haine particulièrement vive. Cet assassin est mort, avant-hier, dans une voiture ciblée par un drone américain, et sa disparition est un nouveau signe, symboliquement fort, du recul de son organisation.

Bombardé par la coalition internationale qu’on formée les Etats-Unis et attaqué, au sol, par les milices kurdes armées et financées par les Américains, Daesh perd aujourd’hui pied en Irak, en Syrie et jusqu’en Libye où ses hommes ne sont plus loin d’avoir perdu le port pétrolier de Syrte dont ils avaient pris le contrôle.

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Daesh ne constituera pas le nouvel Etat sunnite que ses dirigeants avaient ambitionné de former de part et d’autre de la frontière irako-syrienne. Daesh devra bientôt évacuer, c’est une question de mois, les villes irakiennes et syriennes dont ses combattants s’étaient emparés. Sur le papier, Daesh est virtuellement battu mais son éradication se heurte pourtant à deux problèmes majeurs.

Le premier est qu’il est humainement inenvisageable d’aller aplatir sous les bombes Mossoul et Raqqa, les villes irakienne et syrienne dont il a fait ses capitales car leurs populations seraient les premières victimes de ces frappes après avoir déjà tant souffert de l’occupation djihadiste. Il ne peut pas y avoir, là, d’offensive militaire brutale. Il faut bien plutôt couper les djihadistes de leurs sources d’approvisionnement et ne pas leur laisser d’autre choix qu’un retrait comme cela s’est déjà passé dans des villes moins importantes. Cela prendra du temps, plus de temps que le seul rapport de forces ne l’imposerait, et le deuxième problème est encore bien plus complexe.

C’est celui du futur contrôle de ces villes.

En Irak, Mossoul est une ville historiquement kurde que le régime de Saddam Hussein avait peuplée de sunnites afin de mieux la contrôler, que les Kurdes irakiens ambitionnent de récupérer aujourd’hui et que les chiites ne veulent pas plus laisser aux Kurdes qu’aux sunnites. Aux portes de Mossoul, se joue une bataille derrière la bataille et la situation est très semblable à Raqqa dont les Kurdes syriens, ceux qui se battent au sol contre Daesh, aimeraient faire un butin de guerre, dont les sunnites qui la peuplent n’entendent pas se laisser déposséder et que la Turquie ne souhaite certainement pas voir passer aux mains des Kurdes alors qu’elle est entrée en Syrie pour les empêcher d’y former un territoire à eux dont l’indépendance pourrait attiser l’irrédentisme des Kurdes de l’Anatolie turque.

Daesh est si près d’une défaite que l’on se dispute déjà ses dépouilles et que ces disputes, au pluriel car elles sont multiples, retardent son anéantissement en compliquant encore les opérations militaires. Autant, donc, le dire et le savoir : le temps des attentats djihadistes n’est pas déjà révolu.

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