La mesure néerlandaise
Demain, les Pays-Bas vont aux urnes. Avec 17 millions d’habitants, ils ne sont qu’un petit pays mais, outre que leurs peintres, leurs philosophes et leur tradition de tolérance comptent dans l’histoire de l’Europe, leurs législatives ont pris une importance internationale car elles sont censées mesurer, avant la présidentielle française et après Trump et le Brexit, la montée des nouvelles extrêmes droites et du nationalisme.
C’est excessif. Il y a un particularisme néerlandais qui tient au fait que ce pays a eu tant d’avance dans la libéralisation des mœurs que beaucoup, notamment parmi les homosexuels, y voient l’islam et les 5% de musulmans des Pays-Bas comme une menace pour des libertés conquises de haute lutte.
Ce n’est pas le cas partout et ce n’est pas non plus partout qu’une ville aussi essentielle que Rotterdam a pour maire un musulman de gauche, d’origine marocaine et aux compétences reconnues mais le fait est que, comme en France aujourd’hui, l’extrême droite de Geert Wilders et de son parti pour la liberté, le PVV, a longtemps été en tête des sondages.
Le PVV devenait devenir demain le premier des 28 partis qui concourent dans cette élection. Avec un programme de « désislamisation » du pays, de fermeture des mosquées, d’interdiction d’entrée du territoire aux musulmans et d’interdiction du Coran assimilé à un nouveau Mein Kampf, c’eut été le triomphe d’un autre Trump mais, ces derniers temps, les sondages avaient relevé un changement.
Le Parti populaire libéral et démocrate, le VVD du Premier ministre sortant Mark Rutte était repassé en tête. Cet homme de centre droit dont le large sourire est aussi permanent que les cheveux de Geert Wilders sont peroxydés était en passe de refaire passer l’extrême droite sous la barre des 15% mais il y a eu, depuis, l’affaire turque.
En traitant les Néerlandais de « nazis » au motif qu’ils avaient empêché ses ministres de venir faire campagne auprès des Turcs des Pays-Bas pour son référendum constitutionnel du 16 avril, Recep Erdogan a donné un vrai coup de main à Geert Wilders. « Vous voyez bien », disait hier le leader de l'extrême droite mais, d’un autre côté, Mark Rutte s’est montré si ferme face aux éructations d’Erdogan que l’électorat pourrait faire front derrière lui.
On ne sait pas mais la quasi-certitude est que l’extrême droite n’arrivera pas au pouvoir puisque aucun autre parti ne veut d’une coalition avec elle car elle entend également sortir de l’Union. Les Pays-Bas devraient rester gouvernés par une coalition de forces modérées dans laquelle l’homme qui monte est un écologiste de 30 ans, Jesse Klaver, père marocain, mère néerlando-indonésienne, qui a mis les Verts aux rangs des plus grands partis en faisant campagne pour l’ouverture et la tolérance, les vraies traditions des Pays-Bas, dit-il.
Devenu incontournable, il fait un tabac, ovationné aux cris de « Jesse, we can » et beaucoup, bien vite mais tout de même, le voient déjà Premier ministre.
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