La bataille militaire, ils la perdent, mais la bataille politique, c’est une tout autre question.
Militairement parlant, les djihadistes de Daesh sont partout en recul. Ils le sont en Irak, en Libye et en Syrie.
Ils le sont car ils ont tant martyrisé les populations des territoires qu’ils avaient conquis qu’ils ont perdu les soutiens que leur avait d’abord attirés leur projet de création d’un nouvel Etat sunnite à cheval sur l’Irak et la Syrie. Ils le sont aussi parce qu’ils ont tant multiplié leurs atrocités qu’ils se sont retrouvés face à une coalition arabo-occidentale dont la puissance les dépasse. Daesh sera militairement écrasé dans les six ou huit mois qui viennent mais, politiquement parlant, il pourrait bien survivre à cette défaite annoncée pour deux raisons.
La première est qu’on ne peut plus guère croire à un compromis en Syrie. Les Américains craignent tant d’être à nouveau happés par l’engrenage proche-oriental qu’ils vont tenter aujourd’hui, en marge, de l’Assemblée générale des Nations Unies, de recoller les morceaux avec la Russie mais le régime de Damas a d’ores et déjà dénoncé, hier, le cessez-le-feu qu’il n’avait accepté qu’à regret, les insurgés s’apprêtent à reprendre les armes et Vladimir Poutine se montre tout, sauf conciliant.
Tout n’est peut-être pas dit mais il est maintenant possible que les perspectives de règlement négocié s’éloignent pour longtemps en Syrie.
Cela signifie, bien sûr, que le nombre de morts et de réfugiés va encore augmenter. Cela signifie également que, devant le danger d’une remise en selle de la dynastie Assad et de la minorité chiite dont elle est issue, la majorité sunnite de la population syrienne va serrer les rangs dans un combat identitaire et que ce front s’ouvrira, forcément, aux anciens combattants de Daesh. L’absence d’un compromis entre les parties syriennes pourrait, en un mot, transformer la défaite militaire des djihadistes en un simple moment d’une guerre qu’ils n’auraient alors pas encore perdue.
Quant à la seconde raison de ne pas, déjà, les enterrer, elle est qu’ils sont en train de rendre les démocraties totalement folles. Bien des raisons expliquent le succès de Donald Trump aux primaires républicaines, mais la principale est cette peur de l’islam que les djihadistes ont réussi à susciter. Les derniers attentats de New York, du New Jersey et du Minnesota sont du pain béni pour l’adversaire d’Hillary Clinton. Si Donald Trump devenait président des Etats-Unis le 8 novembre, ce serait largement grâce à Daesh dont les dégâts ne sont pas moins grands en Europe.
La première source de division de l’Union européenne est désormais l’afflux des réfugiés syriens qui sèment la panique à cause des attentats djihadistes. Daesh n’est vraiment plus loin de défaire l’unité de l’Europe et ce double succès, des deux côtés de l’Atlantique, disons-le, tristement, rageusement, ce n’est pas mal joué pour un gang d’illuminés en débandade
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