On connaît l’argument et il n’est nullement infondé. Aucun Etat, dit le gouvernement israélien, ne laisserait sans réagir un autre pays, fut-il sans statut juridique, bombarder ou laisser bombarder sa population et c’est exactement ce que fait Gaza.
Depuis que les islamistes du Hamas ont pris le contrôle, en 2007, de ce territoire palestinien qu’Ariel Sharon avait fait évacuer deux ans plus tôt, cette bande de terre misérable et densément peuplée est devenue une plateforme de tir contre les agglomérations du Sud d’Israël. Généralement pauvres aussi, ces agglomérations avaient ainsi été la cible de 80 tirs de roquettes le 26 décembre 2008. C’est ce qui avait provoqué, cet hiver-là, la première guerre de Gaza et là encore, c’est une intensification des tirs palestiniens qui a conduit Israël a assassiner, mercredi dernier, le chef de la branche militaire du Hamas par un tir de drone qui a aussitôt déclenché les hostilités actuelles.
Si l’on s’en tient à cet enchaînement, Israël n’est pas l’agresseur. Israël a le droit de se défendre et en a même le devoir vis-à-vis de sa population. Il est donc absurde de considérer que son Premier ministre, Benjamin Netanyahou, aurait délibérément suscité cette crise afin de remporter les élections de la fin janvier dont il était, de toute manière, assuré de sortir vainqueur mais tous les torts ne sont pourtant pas, et loin de là, que d’un côté.
Si l’on est là, c’est aussi qu’Israël n’a rien fait pour que les Accords d’Oslo puissent réellement déboucher sur la coexistence pacifique de deux Etats, qu’il a au contraire développé et poursuivi sans relâche, sous tous ses gouvernements, la colonisation des Territoires occupés, qu’il a ainsi affaibli le Fatah au profit du Hamas, les partisans d’un compromis au profit d’islamistes qui ne veulent pas reconnaître l’existence d’Israël, et totalement marginalisé l’Autorité palestinienne sans laquelle il n’y a pas de négociations possibles.
La droite israélienne au pouvoir peut malheureusement dire aujourd’hui qu’elle n’a pas d’interlocuteur pour la paix mais le fait est qu’Israël a tout fait pour qu’il en soit ainsi et le pire n’est même plus là.
Le pire est désormais que cette montée de la tension place le nouveau président égyptien, un islamiste, dans une situation impossible puisqu’il ne peut ni rompre les accords de paix avec Israël alors qu’il a un besoin vital du soutien américain ni rester indifférent au sort de Gaza alors que sa base ne l’est pas du tout et que son parti, les Frères musulmans, est concurrencé par les salafistes.
C’est toute la région qui est maintenant menacée d’une radicalisation pouvant mettre fin au lent processus de démocratisation des pays arabes.
Cette crise ne fait pas que faire couler le sang palestinien et faire courir le risque d’un embasement beaucoup plus violent encore si des missiles touchaient Tel Aviv.
Cette crise porte en elle une catastrophe régionale et même si une trêve – on peut encore l’espérer – venait l’interrompre à temps, sa leçon est que les Etats-Unis, l’Europe et les pays arabes ne peuvent plus tarder à présenter un plan de règlement définitif aux Israéliens et aux Palestiniens et à le leur imposer par toute pression nécessaire.
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