Pas de drapeau national, mais la communauté internationale incarnée par l’OMS, pour l’arrivée hier au Ghana des premiers vaccins anti-covid de l’initiative Covax. Une rupture avec le nationalisme vaccinal qui semblait s’imposer.
La journée d’hier doit être marquée d’une pierre blanche, car les premières doses de vaccins anti-covid sont arrivées au Ghana, en Afrique de l’Ouest. La cargaison ne portait pas le drapeau d’un État, quel qu’il soit, mais était offerte au titre du programme Covax, dans le cadre de l’Organisation mondiale de la Santé ; et donc au nom de la Communauté des nations, un concept qui a semblé bien absent depuis le début de la pandémie.
Ce premier geste symbolique, qui devrait être suivi de la livraison de plus de deux milliards de vaccins à l’Afrique d’ici la fin de l’année, constitue le meilleur antidote au nationalisme vaccinal qui semblait devoir s’imposer. Ces dernières semaines, on a pu voir arriver des cargaisons frappées des drapeaux chinois ou russes dans des capitales soigneusement choisies, tandis que les Occidentaux se débattaient dans leurs problèmes d’approvisionnement et semblaient oublier les plus pauvres… Il n’y a pas de petit profit diplomatique.
La politisation extrême de la pandémie est un élément incontournable depuis un an, alimentée par la rivalité sino-américaine, et la recomposition des rapports de force dans le monde. Il était inévitable que l’accès aux vaccins, un enjeu-clé pour sortir de la crise sanitaire, soient pris dans ce climat délétère.
Le démarrage du programme Covax marque une rupture avec cette concurrence très idéologique. Personne ne peut récupérer Covax, qui a été lancé en juin dernier, lors d’une visioconférence réunissant l’OMS, les Européens dont la France, l’Allemagne, la Commission… ; des pays de tous les continents ; et les grandes fondations comme celle des incontournables Bill et Melinda Gates. Mais pas les États-Unis de Donald Trump qui s’apprêtaient à claquer la porte de l’OMS – depuis, Joe Biden a annoncé une importante contribution financière à Covax et réintégré l’OMS. La Chine en fait également partie, quoique modestement.
La logique est à la fois celle de la solidarité avec les pays en développement qui n’ont pas les moyens d’entrer dans la course aux vaccins des labos ; mais aussi la réalité d’une pandémie qui ne sera surmontée que quand elle le sera partout dans le monde, et pas seulement chez les riches.
Pour autant, le vaccin n’est pas un « bien public ». Si ce programme constitue un immense espoir de voir le monde accéder sans trop de décalage aux vaccins, quel que soit le niveau de richesse, l’idée du « bien public » est restée jusqu’ici un slogan creux.
Hier encore, l’UNESCO appelait à faire des vaccins un « bien public mondial », ce qui impliquerait que l’industrie pharmaceutique en partage la propriété intellectuelle, ce qui ne serait pas aberrant étant donné l’ampleur des fonds publics qui ont financé la recherche. Cela n’a pas été possible jusqu’ici.
Néanmoins, si tout est évidemment loin d’être parfait, le démarrage hier du programme Covax est une bonne nouvelle ; il y aura rarement eu aussi peu de temps dans l’accès à un vaccin nouveau entre les pays riches et pauvres.
Le Ghana, suivi dans quelques jours par la Côte d’Ivoire, aura donc reçu 600 000 doses du vaccin Astra Zenica britannique, fabriquées dans des usines en Inde, et financées par la communauté internationale. Cette mondialisation-là a du sens, on n’a pas tous les jours l’occasion de s’en réjouir !
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