Où l'on voit comment la guerre de Yougoslavie a doté l'Union de sa monnaie unique.
Ce sera donc l’un des thèmes majeurs de leur débat de ce soir. Emmanuel Macron dira pourquoi il veut préserver la monnaie unique et l’accompagner, demain, d’une politique économique commune fondée sur une harmonisation des régimes fiscaux et des systèmes de protection sociale. Mme Le Pen expliquera à quel rythme, comment et au profit de quoi elle veut sortir de l’euro, mais cette monnaie unique, d’où vient-elle ?
On l’a largement oublié mais sa naissance doit beaucoup à la guerre de Yougoslavie. Dans la foulée de l’effondrement soviétique, la Fédération de Yougoslavie se déchirait. Autrefois intégrés à l’Empire austro-hongrois et désireux de rompre avec la Yougoslavie pour rejoindre les Communautés européennes, les Slovènes se détachent de la Fédération dès l’automne 1989.
L’Autriche les soutient en sous-main. Les Croates rêvent également de faire sécession et vont bientôt tenter de suivre l’exemple slovène. Les Serbes s’opposent à cette dislocation d’un Etat fédéral dont ils étaient loin de profiter le plus mais dont ils sont la colonne vertébrale. Les Balkans retombent dans la guerre, une guerre civile qu’aucun de leurs peuples n’aurait pu concevoir six mois plus tôt, une guerre dont on connaît l’horreur, une guerre de plus de dix ans puisqu’elle ne s’achèvera vraiment qu’en 1999 avec le bombardement de Belgrade par l’Otan mais ce n’est pas tout.
Dès ses premiers jours, le conflit yougoslave met à l’épreuve l’unité européenne et l’entente franco-allemande car les alliances d’antan se reforment de fait avec une France proche de la Serbie et une Allemagne de la Croatie.
Le président français et le chancelier allemand s’appellent alors François Mitterrand et Helmut Kohl. Ils ont l’un et l’autre vécu la Deuxième guerre mondiale et sont férus d’histoire. Ils voient le danger d’un enchaînement pouvant être fatal, comme en 14, à la paix du continent Europe et décident donc, pour conjurer le sort, d’accélérer l’unification européenne en la scellant dans une monnaie unique. Ils n’improvisent bien sûr pas. Beaucoup de choses étaient en préparation. Cela devait se faire mais ils précipitent le mouvement, pressés par l’histoire qui ressort comme un diable de sa boîte.
Cette accélération aura des conséquences sur l’euro, et même sérieuses puisque l’Union se dote ainsi d’une monnaie unique alors qu’elle a toujours autant de politiques économiques que de membres.
Ni Kohl ni Mitterrand n’ignoraient ce handicap mais, dans l’urgence, ils avaient considéré que l’économie suivrait la monnaie car il ne pouvait pas y avoir de monnaie unique sans harmonisation économique.
L’un dans l’autre, on en est toujours là car cette harmonisation est tout, sauf aisée mais les dangers s’amoncelant sur l’unité européenne, la France, l’Allemagne, l’Italie et le Benelux, les six pays fondateurs, se sont aujourd’hui mis d’accord pour faire progresser l’Union à des rythmes différenciés afin de permettre aux économies européennes d’enfin s’harmoniser.
C’est l’héritage que trouvera l’élu du 7 mai, un legs que l’une veut refuser alors que l’autre veut le faire fructifier.
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