Les riches grecs souffrent aussi !

France Inter
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Anthony Bellanger

Ce matin, vous allez nous parler de la Grèce mais en vous intéressant aux riches...

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Mais parce qu'ils souffrent aussi les riches grecs. On ne le souligne pas assez. Que faire lorsqu'on ne peut pas, à cause du contrôle des changes, déplacer son argent sur un compte à l'étranger ou retirer plus de quelques dizaines d'euros par jour au distributeur ?

Que faire surtout lorsque des rumeurs folles circulent à Kifissia ou à Kolonaki, deux quartiers huppés de la capitale grecque ? Il se murmure que bientôt, là, demain, le gouvernement grec prendra 40% de tous les comptes au-dessus de 100 000€.

Du coup : panique à bord. Première solution, acheter en masse. Parce que les cartes de crédit fonctionnent encore. Du coup, les bijouteries des quartiers chics et moins chics ne désemplissent pas : tous ceux qui ont des liquidités les transforment en bijoux.

Le réflexe est connu : on achète de l'or, des pierres, et on stocke en attendant des jours meilleurs. Mais tout ce qui est négociable se vend en ce moment comme des petits pains : voitures, téléphones de luxe... Mais encore faut-il qu'on accepte de vous vendre.

Les commerçants doivent être ravis !

Pas forcément. George Papalexis est joaillier à Athènes. Il y a quelques jours, un client a voulu acheter pour 1M€ de bijoux. Refus du joaillier. Pourquoi ? Parce que quand deux riches se rencontrent, le joaillier et le client, les deux ont des problèmes de riches.

Je m'explique : le client aurait réglé son problème, vider son compte bancaire. Mais le joaillier, lui, aurait vu son propre compte crédité d'un million. Un million sur un compte, c'est 900 000€ de trop que le gouvernement pourrait taxer à 40%. Donc, pas question !

Mais il y a d'autres techniques pour contourner la loi quand on est riche et paniqué. Par exemple, ouvrir des comptes multiples et diviser d'autant ses liquidités. Ou encore, mais c'est plus dangereux, transférer ses sous chez sur le compte de parents pauvres.

Le but est toujours le même : se rapprocher le plus possible des fameux 100 000€ par compte bancaire. Je vous rappelle tout de même qu'il ne s'agit que d'une rumeur et que personne n'a encore décidé quoi que ce soit ni au gouvernement, ni dans les banques.

Mais c'est l'Etat grec qu'on dépossède... Ce n’est pas très civique...

Si les riches grecs étaient civiques, la Grèce n’aurait peut-être pas autant de problème à finir ses fins de mois. Mais en fait, le paradoxe, c'est que les riches grecs, depuis quelques jours, paient rubis sur l'ongle tous leurs impôts pour 2015.

Là aussi, ça demande quelques explications : d'abord, ils veulent montrer patte blanche, histoire de ne pas fâcher ces « communistes » de Syriza – je cite bien sûr. Ensuite, ils appliquent la même logique que tout à l'heure.

Si tout ce qui est au-dessus de 100 000€ menace d'être taxé à 40%. Autant payer là, tout de suite maintenant ses impôts, mais aussi ses loyers, qu'ils paient pour l'année, ses assurances, ses faux-frais, tout ce qu'ils peuvent histoire de dégonfler leur compte.

Au final, c'est l'Etat grec qui encaisse et sur une simple rumeur, je le rappelle ! Enfin, il y a ceux qui non seulement paniquent mais qui sombrent carrément dans la dépression. Comme cet agent de voyage athénien, patron d'une dizaine de salariés.

Depuis quelques jours, son agence est déconnectée du système global d'émission de billets d'avions. Il a donc réuni son personnel et a commencé son discours par ces mots : « avec ces communistes, nous allons tous mourir ». Ses salariés en rigolent encore...

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