Vénézuéla : la pandémie est hors contrôle

Des employés de la protection civile enterrent une personne décédée du Covid-19 en suivant le protocole sanitaire à San Cristobal
Des employés de la protection civile enterrent une personne décédée du Covid-19 en suivant le protocole sanitaire à San Cristobal ©AFP - Jorge Mantilla / NurPhoto
Des employés de la protection civile enterrent une personne décédée du Covid-19 en suivant le protocole sanitaire à San Cristobal ©AFP - Jorge Mantilla / NurPhoto
Des employés de la protection civile enterrent une personne décédée du Covid-19 en suivant le protocole sanitaire à San Cristobal ©AFP - Jorge Mantilla / NurPhoto
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D'un côté, Nicolás Maduro assure faire beaucoup mieux que ses voisins ; de l'autre, il accuse les Vénézuéliens de retour au pays de propager le "virus colombien". La réalité est plus effrayante encore.

Direction le Vénézuela ce matin, où la pandémie de Covid19 est hors contrôle avec une augmentation du nombre de cas d'un tiers par semaine et ce, depuis près d'un mois. Un effondrement dramatique du système hospitalier antérieur à la pandémie mais qui, du coup, rend la réponse sanitaire illusoire et un régime qui nie, encore et toujours.

Il suffit pour cela d'écouter le président vénézuélien Nicolás Maduro : depuis plusieurs jours, il accuse ses propres compatriotes, qui tentent de rentrer au pays, de contaminer les Vénézuéliens de l'intérieur en propageant ce qu'il appelle « le virus colombien ».

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Dans un drôle de parallèle avec Donald Trump qui, vous le savez, parle de « virus chinois » pour le Covid19, Nicolás Maduro et ses ministres ne parlent plus que de « ce virus colombien » qui, ajoute-t-il, « tue de bons Vénézuéliens ».

Les dictatures mentent, les démocraties comptent mal

Le président vénézuélien s'est donc un peu piégé lui-même en évoquant les infections importées par les Vénézuéliens de retour au pays. Parce qu'officiellement, il explique que « tous les malades du coronavirus ont une place à l'hôpital public ». Par ailleurs, il ajoute que le pays fait beaucoup mieux que ses voisins, avec 12 000 cas et une centaine de morts.

C'est vrai que, si l'on s'en tient aux chiffres officiels, la différence avec la Colombie voisine est abyssale : la Colombie compterait 16 fois plus de cas et 40 fois plus de morts que le Vénézuéla avec qui elle partage plus de 2000 km de frontière ! Absurde. La question reste donc : faut-il croire ou non les statistiques vénézuéliennes ?

Sur la pandémie, j'applique au Vénézuéla le même axiome qu'avec la Russie ou la Chine : les dictatures mentent, les démocraties comptent mal. Les informations que font fuiter du terrain les personnels soignants vénézuéliens sont d'ailleurs éloquents : à Maracaïbo, une ville d'un million et demi d'habitants à 700 km de la capitale, Caracas, l'hôpital central suit environ 500 patients, le double d'il y a un mois et la dizaine de respirateurs sont tous utilisés, avec une liste d'attente qui s'allonge dangereusement.

Le nombre de soignants infectés alors qu'ils manquent de tout équipements de protection est alarmant : toujours dans la région de Maracaïbo, 44 médecins et soignants ont été hospitalisés, 9 sont morts et une douzaine sont toujours en soins intensifs.

Une pandémie incontrôlée...

Oui mais paradoxalement, Nicolás Maduro ne dit pas que des bêtises lorsqu'il parle de « virus colombien ». Lorsqu'on regarde la carte de l'épidémie au Vénézuéla, ce sont les zones frontalières avec la Colombie qui sont le plus affectées.

Reste qu'il ne peut s'en prendre qu'à lui-même ! La crise économique est si sévère que des milliers de Vénézuéliens en sont réduits à faire de la contrebande entre les deux pays. Or des centaines d'aller-retours illégaux, le Covid-19 n'en demandait pas tant !

Enfin, accuser les Vénézuéliens de retour au pays de propager l'épidémie est ignoble : ils sont 5 millions à avoir quitté le Vénézuéla, faute de travail et même de nourriture. Or, Depuis le début de la pandémie, 45 à 60 000 d'entre eux ont choisi de revenir au pays. Ils avaient perdu leur emploi dans leur pays d'accueil : Colombie, Pérou, Equateur, Brésil...

Il y a quelques semaines encore, à leur arrivée au pays, Nicolàs Maduro les accueillait comme des héros revenus de « l'enfer capitaliste ». Les voilà aujourd'hui traités comme des pestiférés. Ce régime n’a décidément ni constance ni honneur…