François Mitterrand et l'attentat de l'Observatoire

France Inter
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Il y a 58 ans, la carrière du sénateur et ancien ministre de la IVe République aurait pu se terminer dans un scandale judiciaire infiniment plus terrible que le "Penelope Gate".

Francois Fillon a relancé sa campagne cette semaine, mais toujours sous la menace d'une mise en examen. Ce n’est pas le premier politique à être menacé par le scandale. Claude Askolovitch se souvient de l'attentat contre François Mitterrand, il y a 58 ans.

Le 16 octobre 1959, un commando tire à la mitraillette sur la voiture de François Mitterrand, tout près du jardin du Luxembourg à Paris. Il échappe à l’attentat en se réfugiant dans le Jardin de l’Observatoire. Dans les jours qui suivent, on célèbre son sang-froid.

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Mitterrand est sénateur de la Nièvre un des opposants au gaullisme. Un personnage de la IVe République, un homme du passé. Mais devenir la victime d’un attentat - on pense à des milieux radicaux de l’Algérie française - lui redonne instantanément une stature nationale.

Voilà l’homme du passé réinstallé. Mais il n’a pas tout dit...

Six jours après, la belle image de Mitterrand se décompose

Robert Pesquet, ancien député, militant de l’Algérie Française, accuse Mitterrand d’avoir organisé cet attentat avec lui, pour marquer des points politiques, pour se faire de la publicité. L’opinion s’inverse. Mitterrand est la risée de la presse. Et le pouvoir politique saisit l’occasion d’affaiblir un opposant. Comme dirait Fillon, l’assassinat politique se prépare. La justice ouvre une enquête sur un outrage à magistrat, puisqu’il n’a pas dit la vérité aux enquêteurs. Le Sénat va lever son immunité parlementaire et Mitterrand sera inculpé. Mitterrand, la fausse victime, le menteur, accuse le coup. Des amis le voient pleurer, le pensent proche du suicide.

Pourtant, il se défend

Et il se sauve. D’abord en s’humiliant : il dit que lui, Mitterrand a été piégé. Le fameux Pesquet était venu le voir en lui disant qu’il était menacé, qu’il pouvait le protéger mais il ne faudrait jamais parler de lui, et il l’avait cru. Ça c’est la première étape de sa défense.

Mais ensuite, c’est le réflexe des politiques, il cherche des ennemis. Il se reconstruit en frappant. Il se dit vitime d’un complot de l’extrême droite ou d’un complot du pouvoir. Et le 18 novembre, au Sénat, il accuse à son tour. Il dit que deux ans plus tôt, quand il était Garde des Sceaux, un homme était venu le voir, qu’on accusait d’un attentat en Algérie, et il l’avait protégé. Cet homme, c'était Michel Debré. le Premier ministre du Général de Gaulle. Et la confusion devint générale.

Cette défense sera efficace

Chacun peut faire très mal à l’autre dans cette affaire, et la justice sera lente, jusqu’à une amnistie en 1966. Pesquet, qui était un homme de l’ombre un peu mythomane, donnera des versions contradictoires de l’histoire jusqu’à sa mort. Mitterrand reviendra.

En six ans, la honte est devenue la preuve de son combat contre les officines, avec une pointe de menace. Et il va mettre De Gaulle en ballotage.

On peut se relever d‘un scandale

En tous cas on pouvait. Les politiques étaient encore les maitres de leur histoire. C’était un autre temps. Sans le bruit de l’information en continu, sans que l’on martèle et on répète jour après jour. L’opinion n’imprimait pas de la même manière. Donc on survivait, et si on était blessé, on était plus fort.

Il y a quelques mois, Anne Pingeot, qui fut l’autre femme de la vie de Mitterrand avec son épouse Danièle, a parlé de l’attentat de l'Observatoire sur France Culture.

►►► Anne Pingeot sur l'attentat de l'Observatoire : "La droite a failli vraiment l'abattre, définitivement, mais c'était mal connaître cette énergie indomptable"

Je me suis demandé ce qu’en dira Pénélope Fillon, ce que dira dans cinquante ans une femme aimante, à propos de François Fillon.