Depuis le confinement, les aides de l’Etat pleuvent par dizaine de milliards d’euros sur les entreprises. L’objectif, c’est de préserver l’emploi et leur capacité à investir. Ont-elles joué le jeu ou y a-t-il des “corona profiteurs” ?
C’est la question que posent Maxime Combes et Alexis Petitjean, qui ont créé l’Observatoire des multinationales, pour surveiller le CAC 40, tout en travaillant pour le site d’information Bastamag. Ils sont proches du mouvement Attac, donc très critiques du capitalisme actuel.
Pour y répondre, les journalistes ont dépouillé la presse économique et la presse quotidienne régionale, ils ont recueilli des témoignages sur les réseaux sociaux avec le hashtag #Allôbercy. Un travail de fourmi pour analyser si l’argent public sert bien l’intérêt général ou s’il enrichit d’abord les actionnaires, à travers le versement de dividendes.
Bruno Le Maire, le ministre de l’économie et des finances, avait notamment fait cette recommandation aux entreprises: “Soyez exemplaires: si vous utilisez le chômage partiel, ne versez pas de dividendes”. Il s’agissait de voir si elle a été suivie.
Et alors, la réponse ?
Elle est en demi-teinte. Sur les 24 entreprises du CAC 40 qui ont profité du chômage partiel, 14 ont versé un dividende. Et trois d’entre elles n’ont eu aucun scrupule à prendre l’argent public tout en augmentant la rémunération de leurs actionnaires.
Il s’agit de Vivendi, de Schneider Electric et de Teleperformance, le spécialiste des centres d’appel qui vient d’entrer au CAC 40. Des “corona-profiteurs complètement décomplexés”, selon l’étude.
Et ça ne s’arrête pas là. Vivendi, dont le premier actionnaire est Vincent Bolloré, est lancé dans une bataille boursière pour le contrôle du groupe Lagardère (Hachette, Relay, Europe 1).
Schneider Electric a, lui, annoncé une assez vaste restructuration avec des suppressions de postes.
Les risques c’est pour l’Etat et les salariés, les profits pour les actionnaires, donc…
Et les autres entreprises du CAC 40 ont joué le jeu ?
Plus ou moins. Une douzaine seulement ont supprimé complètement le versement de dividendes. Les banques notamment, à qui la BCE n’a pas laissé le choix: elle leur a imposé de faire des réserves pour pouvoir financer les entreprises et tenir le coup en cas de vague de faillites.
Il y a aussi des groupes comme Atos, Saint-Gobain, Essilor ou Engie qui ont choisi de préparer l’avenir. Et des grands blessés qui n’ont pas pu faire autrement: Airbus, Safran, PSA ou Renault.
Alors faut-il des contreparties plus strictes aux aides ? Elles ne sont pas faciles à définir, mais le débat est ouvert. Il commence aujourd'hui au Parlement.
Le lien vers l’étude et celui vers l’interview de Maximes Combes par L’Obs
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