

Aux Etats-Unis, le ministère de la Justice se prépare à ouvrir une enquête sur les pratiques anti-concurrentielles du moteur de recherche. Est-on arrivé à un tournant ?
Si ça se confirme, ça serait la première grosse enquête menée au niveau fédéral à l’encontre d’un géant de la high tech, depuis celle sur Microsoft dans les années 90 qui avait duré une dizaine d’années. Concrètement, les autorités américaines devraient regarder de près si Google n’utilise pas sa position dominante dans la recherche et la publicité en ligne pour favoriser ses autres services. En 2013, une enquête similaire avait avorté, au motif que les pratiques de Google ne portaient pas préjudice au consommateur.
Cette fois, le résultat pourrait être différent, notamment parce que le contexte a changé
Les GAFA - Google, Apple, Facebook et Amazon – sont sous le feu des critiques : accusés de servir d’amplificateur aux fake news, d’utiliser à tort et à travers les données personnelles, de ne pas payer leurs impôts, d’étouffer l’innovation, de créer des petits boulots précaires payés à la tâche qui paupérisent une partie de la population américaine. Leur régulation est devenue un enjeu politique. Donald Trump ne perd jamais une occasion de Twitter tout le mal qu’il pense de Google ou d’Amazon. Chez les démocrates, le démantèlement des GAFA est un thème porté notamment par Bernie Sanders dans la course à l’investiture pour la présidentielle de 2020. Le vent a donc tourné, et pas seulement pour Google.
Selon la presse américaine, Amazon pourrait faire lui aussi l’objet d’une enquête fédérale
Facebook devrait sous peu être contraint de payer une amende de 5 milliards de dollars pour n’avoir pas su protéger les données de ses utilisateurs dans l’affaire Cambridge Analytica. Mais à vrai dire, les GAFA ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Dans tous les secteurs, le pouvoir excessif des très grandes entreprises menace aujourd’hui le dynamisme de l’économie américaine. Depuis les cabinets d’avocats jusqu’aux concessionnaires automobiles, les économistes observent une montée de ce qu’ils appellent des entreprises superstar: les 100 premières entreprises des Etats-Unis par le chiffre d’affaires représentent la moitié du PIB américain, contre seulement un tiers il y a 25 ans.
Un phénomène qui dépasse le sol américain
C'est un phénomène mondial, mais en Europe, on s’inquiète plutôt de ne pas avoir assez de champions européens face à la concurrence américaine et chinoise. Le gouvernement français a été énervé par le blocage de la fusion entre Alstom et Siemens par la Commission européenne : il a commandé un rapport pour pousser Bruxelles à assouplir ses méthodes de contrôle de la concurrence et des concentrations. L’exemple des GAFA aux Etats-Unis devrait pourtant inciter à la prudence: avoir des géants n’a pas toujours que des avantages.
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