Par Renaud Dély.
François Bayrou et Emmanuel Macron ne se connaissent pas encore mais ils se détestent déjà.
Je les ai vus récemment l’un et l’autre, séparément, et je peux vous garantir qu’ils ne peuvent pas se sentir. Pourtant, ils ont dîné ensemble il n’y a pas si longtemps et ça ne s’était pas mal passé. C’était cet été, le 9 juillet précisément. Emmanuel Macron était de passage à Pau. François Bayrou était ravi de l’accueillir. Ils ont passé trois heures à table tous les deux. Ils ont bu du bon vin, parlé d’Histoire, de littérature, de tout, de rien. Ils ont dit du mal de Sarkozy, beaucoup, se sont moqués, un peu, de Hollande**.** Et ils se sont quittés en fin de soirée, apparemment de bonne humeur.
Ils n’ont pourtant pas vraiment le même souvenir de cette soirée. C’est bizarre la mémoire, ça vous joue de ces tours parfois. Macron jure que ce dîner était très sympa. Bayrou, lui, il l’a trouvé sans intérêt. Et depuis, il a trouvé une nouvelle étiquette pour désigner Macron : il l’appelle l’hologramme ! Un type vague, flou, sans contenu, bref, un mirage. Macron s’en amuse, il s‘étonne que Bayrou « dégaze » à ce point à son propos, c’est son expression. Mais c’est vrai que le leader du Modem n’arrête pas. Il suffit de citer le nom de Macron en sa présence pour le voir balancer des vacheries à tour de bras.
Pourquoi Bayrou accable-t-il ainsi Macron ? Parce qu’il a peur. Peur de se faire piquer son fond de commerce. C’est humain… Macron prétend bousculer les élites, dépasser le clivage gauche-droite, enterrer les vieux partis et rassembler ceux qu’il appelle les « progressistes » des deux camps.
Souvenez-vous, c’était justement le projet de Bayrou il y a dix ans, en 2007. En fait, ces deux-là se ressemblent trop pour pouvoir se supporter. C’est ça le drame de la politique : quand tout sur le fond devrait conduire deux dirigeants à s’allier, l’ambition les contraint à s’affronter. Parce qu’à la présidentielle, il n’y a qu’un fauteuil pour deux.
Et la vraie raison de l’animosité de Bayrou tient en un nombre : 27 ! 27 ans, c’est la différence d’âge entre lui, 65 ans, et Macron, 38 ans… Déjà candidat à trois reprises à la présidentielle, Bayrou sait qu’il est en train de se faire piquer le talisman de la rénovation par un gamin qui ne s’est jamais présenté à aucune élection. Et ça, croyez-moi, ça l’agace !