On l’a encore vu hier soir pendant le débat, Benoît Hamon, n’est vraiment pas à l’aise avec la personnalisation du pouvoir qui va avec l’élection du président de la République.
Par Jean-Baptiste Daoulas.
Quand on lui demande quel président il veut être, il est le seul à répondre par une autre question : “quel peuple voulons-nous être ?” C’est symptomatique de sa campagne. Il parle tout le temps “d’intelligence collective”, “collaborative”, il revendique de ne pas avoir réponse à tout. Bref, il refuse catégoriquement de jouer l’homme providentiel.
Et quand il met les bras en croix pendant un meeting, ce n’est pas parce qu’il se prend pour Jésus Christ. Non, c’est tout simplement pour se moquer d’Emmanuel Macron qui, lui, donne parfois l’impression d’avoir entendu des voix. Pourtant, incarner l’homme providentiel, développer un récit personnel autour de sa candidature, qu’on le veuille ou non, c’est aussi ça une élection présidentielle.
Alors que d'habitude Benoît Hamon répugne à jouer le jeu, par petites touches, il commence à céder. Un exemple tout simple: à son siège de campagne avec quelques journalistes vendredi dernier, à peine deux jours avant le meeting de Bercy, le plus important de sa campagne, on lui a demandé s’il comptait en profiter pour mettre en scène des éléments personnels, lui qui a toujours refusé de parler de sa vie privée. Il a botté en touche avec une petite blague. On est reparti sans réponse. Mais dimanche, fin du suspense. Pour la première fois, Gabrielle Guallar, la compagne de Benoît Hamon est venue assister à un de ses meetings. Et histoire de s’assurer qu’on avait tous bien compris qu’elle était là, le réalisateur de Bercy l’a filmée en gros plan pendant le discours. Ce n’est qu’un petit détail, évidemment. Mais le message, c’est que, désormais au nom de l’élection présidentielle, Benoît Hamon accepte de sacrifier un peu de sa vie privée.
Autre concession: il a gagné la primaire sur une ligne très à gauche, critique avec le bilan de François Hollande. Et pourtant, désormais, vous noterez que dans chaque discours, il trouve une bonne raison de rendre hommage au président et à ses ministres. Benoît Hamon est bien obligé de donner des gages pour rassembler la famille socialiste. Et donc d’assumer une partie du quinquennat. Concession, également sur le fameux revenu universel : Depuis janvier, le candidat a considérablement édulcoré la mesure pour gagner en crédibilité. A tel point qu’un soutien de Manuel Valls ironise en privé : “Benoît Hamon, il en est à sa vingt-huitème version du revenu universel !”
Alors, les vallsistes se moquent, mais au moins, avec toutes concessions accordées par Benoît Hamon, il ne pourront plus le suspecter de préparer un futur congrès du PS plutôt que l’élection présidentielle.