Le détective Philip Marlowe, héros des polars de Raymond Chandler

L'acteur Humphrey Bogart interprète le détective Philip Marlowe dans le film "Le grand sommeil" de Howard Hawks, 1946
L'acteur Humphrey Bogart interprète le détective Philip Marlowe dans le film "Le grand sommeil" de Howard Hawks, 1946 ©Getty - John Springer collection / Contributeur
L'acteur Humphrey Bogart interprète le détective Philip Marlowe dans le film "Le grand sommeil" de Howard Hawks, 1946 ©Getty - John Springer collection / Contributeur
L'acteur Humphrey Bogart interprète le détective Philip Marlowe dans le film "Le grand sommeil" de Howard Hawks, 1946 ©Getty - John Springer collection / Contributeur
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Une personne admirable que ce soit dans la Californie des années 1940 ou la France de 2023. Un type qui a conscience que ce n’est pas simple d’être quelqu’un de bien mais qui y parvient en dépit de son regard insolent sur le monde qui l’entoure, et qui cache un grand sentimental.

Il est brun avec les yeux foncés, il mesure un peu plus de 1,85 m et il pèse dans les 75 kg. On imagine qu’il est bien de sa personne, mais c’est le genre d’expression qui déplairait à cet homme qui ne se fie jamais aux apparences. Et, de toute manière, c’est assez logique qu’on ne sache pas grand chose du physique de mon ami de toujours Philip Marlowe, le détective californien, vu que c’est lui, le narrateur des polars de Chandler : quand on raconte ses propres enquêtes, on ne dit pas combien on pèse le jour où on est engagé par un vieil handicapé friqué qui a deux filles pas piquées des vers comme dans ce pur chef d’œuvre qu’est "Le grand Sommeil".

Le truc qui compte le plus pour définir Marlowe, le plus grand héros de romans noirs, c’est l’argent : il en a juste assez pour vivre et c’est très bien comme ça. Il pourrait s’enrichir facilement puisqu’un privé travaille souvent pour les puissants. Il pourrait leur réclamer des notes salées mais non c’est toujours pareil : vingt-cinq dollars par jour, plus les frais.

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Il n’est pas tendre avec les riches. Non car la corruption, et surtout le mensonge, le répugnent. Il aurait face à lui un homme de pouvoir qui dirait « qui aurait pu prédire … », il lui balancerait immédiatement une saillie sarcastique. Marlowe ne peut pas s’empêcher de jeter un regard insolent sur le monde qui l’entoure, et c’est sans doute pour cela qu’il a été viré de son premier boulot, inspecteur dans une compagnie d’assurances.

Raymond Chandler, lui, fut directeur de compagnies pétrolières avant que la grande dépression lui fasse perdre sa place, et qu’il se lance dans l’écriture. Dans un entretien, l’auteur daigne donner une piste sur son personnage : « Marlowe et moi, nous ne méprisons pas les classes supérieures parce qu'elles prennent des bains et ont de l'argent : on les méprise parce qu'elles sonnent faux » Il écrira aussi : « Je me suis occupé des gens, de ce monde corrompu dans lequel nous vivons, et de montrer comment un homme qui essaie d'être honnête passe en fin de compte pour sentimental ou cinglé »

Marlowe ne « passe » pas pour sentimental, il l’est ! C’est pour cela que je l’aime tant, que j’aime sa manière faussement goguenarde et si merveilleusement laconique de parler des femmes, alors qu’il croit à l’amour. Mon privé chéri est un romantique qui ne se laisse pas embobiner par les filles faciles, et Chandler, encore lui, le résume bien avec cette phrase : « Je pense qu’il peut séduire une duchesse et je suis quasiment sûr qu’il ne toucherait pas à une vierge ».

Au cinéma, il eut le physique d’Eliot Gould, de Robert Mitchum et bien sûr d’Humphrey Bogart mais savez-vous quel acteur aurait idéal d’après Chandler ? Cary Grant. Et franchement c’est à lui que je pense, maintenant, en lisant les sept romans dont il est le héros.

Imaginez cette scène du "Grand Sommeil" avec Cary, le grand échalas élégant dans le rôle : quand la sublime Vivian découvre son bureau rudimentaire de détective, elle constate :

- "Vous n’avez pas beaucoup de façade"

Il répond tranquillement : "si vous êtes honnête, ce commerce ne rapporte pas lourd. Quand vous avez une façade c’est que vous faites de l’argent ou que vous espérez en faire".

- "Tiens ? Vous êtes honnête ?"

- "J’y arrive péniblement"