

Notre ventre, où il se passe décidément beaucoup de chose, est le théâtre de guerres sanglantes. À chaque instant sans que vous le sachiez, votre flore bactérienne se transforme en un véritable champ de bataille. Une tuerie mettant en scène des milliards de soldats s’affrontant dans des combats sans merci.
Depuis les découvertes récentes sur le microbiote, la vie secrète des bactéries a révélé que ces micro-organismes se protégeaient non seulement contre les virus mais aussi contre leurs propres congénères.
Le quotidien d’une bactérie n’est donc pas de tout repos. Et si l’organisation de cette communauté microbienne se traduit généralement par une vie sociale faite d’échanges courtois et de coopération, les choses peuvent rapidement tourner au vinaigre lorsque la compétition guette autour des ressources nutritionnelles.
L’idée étant bien sûr de survivre lorsque les conditions deviennent défavorables.
Quelles sont les armes des bactéries ?
Qu’elles soient pathogène ou pas, un quart des bactéries de notre microbiote possède un équipement tout droit sortie de Game Of Thrones. Et leur arme de prédilection est une arbalète moléculaire digne du Moyen-Âge, capable de décocher une micro flèche toxique en direction de l’ennemi.
Des scientifiques américains l’ont découverte en 2006. Ce sont ensuite des chercheurs du laboratoire d’ingénierie des systèmes macromoléculaires à Marseille qui ont détaillée la structure de l’arbalète pour monter à quoi ressemble vraiment cette machinerie de guerre.
Comment est élaborée cette arbalète moléculaire ?
Ce sont d’abord les protéines de la membrane de la bactérie elle-même qui la constituent. Et rien ne manque ! L’arbalète se compose en effet d’une flèche empoisonnée entourée d’un ressort qui se contracte pour expulser l’ensemble. Un atome de métal situé à l’intérieur de la flèche assure même le renforcement de la pointe toxique.
La seule condition pour être totalement efficace étant pour la bactérie d’être placé au plus près de sa cible, la nature ne l’ayant pas dotée de la vision.
Dans une publication récente, les chercheurs de Marseille ont identifié chez une bactérie pathogène une protéine qui sert également de loquet pour maintenir le ressort sous tension.
Mais ce qui est le plus bluffant c’est la rapidité avec laquelle l’arbalète moléculaire est fabriquée. Les observations au microscope montrent en effet que la bactérie peut dégainer une nouvelle arme toutes les 40 secondes au moment ou elle entre en contact avec son adversaire. L’efficacité est redoutable et la proie meurt en général dans les minutes qui suivent l’assaut.
Les chercheurs poursuivent leurs travaux car des questions se posent encore : quel est par exemple le coût énergétique lié à la fabrication d’une arme aussi sophistiquée ? Ils aimeraient également savoir si la bactérie recycle son arbalète ?
Cela peut vous sembler étrange mais la science est curieuse de tout. En attendant dans notre microbiote, les luttes, on le sait désormais, sont vraiment intestines !
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