Dans l’édito carré, les avantages de vivre avec une grand-mère…
Avec une étude publiée il y a deux semaines dans la revue Current Biology et qui montre qu’avoir une grand-mère auprès de soi est sans doute l’une des clefs de l’évolution humaine.
Il s’agit de « l’hypothèse de la grand-mère ». Je m’explique. Cette hypothèse affirme qu’une femme qui ne se reproduit plus peut quand même, après la ménopause, augmenter son empreinte génétique en aidant ses enfants à avoir à leur tour des enfants.
Cette hypothèse avait déjà été testée dans plusieurs pays mais une équipe de chercheurs de l’Université de Bern et de l’Université Bishop’s à Sherbrooke au Québec a utilisé une base de donnée unique permettant un suivi sur plusieurs génération, prenant en compte la distance géographique.
Cette base de données québécoise démarre en 1608 au à une époque où les prêtres catholiques commencent à enregistrer toutes les naissances, les décès et les mariages dans leur paroisse. Patrick Bergeron qui est biologiste de l'évolution et qui a co-rédigé l’étude raconte qu’ils ont pu ainsi recueillir les données des premiers colons français débarquant du tout premier bateau à Québec.
Les chercheurs ont ensuite arrêté leurs données démographiques presque deux cents ans plus tard en 1799 afin d’éviter l’influence des avancées de la médecine sur la fertilité comme avec par exemple les méthodes de contraceptions. Cette récolte de données a permis de quantifier le succès reproducteur des grands-mères et de déterminer si la proximité géographique d’une mère avec sa fille aidait cette dernière à avoir plus d’enfants.
Et alors quels sont les résultats ?
Ils montrent d’abord qu’à cette époque la taille des familles est grande au Québec puisque pour les mères vivant près de leurs filles, la moyenne est de huit enfants par famille !
Sacha Engelhardt qui a travaillé sur cette étude montre que lorsque la grand-mère habite à 350 kilomètres de sa fille, la moyenne tombe à 6,5 enfants par foyer. Ce qui veut dire que pour chaque tranche de 100 km de distance avec la grand-mère il y a 0,6 enfant de moins par femme. En terme d’effet global sur la transmission des gènes, cela représente une diminution de 15% ce qui est beaucoup.
L’étude précise que la proximité géographique avec la grand-mère a eu pour effet de réduire la mortalité infantile, elle a permis aux petits enfants d’atteindre plus facilement l’âge de l’adolescence et aux mères d’avoir des enfants plus jeunes.
Bien sûr aujourd’hui dans les pays riches avec la mortalité des enfants qui a diminué, l’effet grand-mère n’est plus aussi notable. Mais cette étude est formidable car elle nous montre que nos mamies ménopausées ont fait bien plus pour l’humanité que du tricot ou des gâteaux. Elles pourraient avoir été sélectionnées par l’évolution pour augmenter les chances de survie de leurs petits-enfants. Et ça franchement ça donnerait presque envie d’avoir sa grand-mère à plein temps à la maison !
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