Le conseil d’administration d’EDF doit se prononcer aujourd’hui sur le projet nucléaire d’Hinkley Point, au Royaume-Uni. Pourquoi ce projet suscite-t-il autant de polémiques ?
Le conseil d’administration d’EDF doit se prononcer aujourd’hui sur le projet nucléaire d’Hinkley Point, au Royaume-Uni. Cela fait des mois que l’entreprise tergiverse, pourquoi ce projet suscite-t-il autant de polémiques ?
Ce n’est pas exagéré de dire qu’EDF joue, avec ce projet, une bonne partie de son avenir. Et je n’aimerais pas être à la place des administrateurs qui doivent voter aujourd’hui. La décision finale devrait a priori être positive. Mais rappelons ici quelques chiffres qui donnent la mesure de l’enjeu. L’investissement est évalué à 22 milliards d’euros, assumé aux deux-tiers par EDF, alors que l’entreprise est lourdement endettée. Et les études préalables ont déjà coûté 2,5 milliards. Sur le papier, le deal avec les Britanniques est séduisant. Ils garantissent un prix de vente élevé de l’électricité pendant 35 ans, et Jean-Bernard Lévy, le PDG d’EDF, promet une rentabilité de 9% par an. Mais ça, c’est si tout va bien. Or, les problèmes sur les chantiers des nouveaux réacteurs EPR donnent le frisson. En Finlande comme en France, à Flamanville, les coûts ont triplé et les délais ont explosé. Dix ans après, les chantiers ne sont toujours pas achevés. A Hinkley Point, le premier réacteur est censé être opérationnel dès 2025. Si la machine se grippe, c’est toute l’équation financière qui sera remise en cause.
Pourquoi l’entreprise n’a-t-elle pas renoncé à ce projet ?
Le dilemme est terrible pour EDF. D’un côté un chantier très risqué, on l’a dit. Mais de l’autre, un renoncement porterait un coup fatal à la technologie EPR. Ce serait scier la branche des exportations nucléaires. Le gouvernement redoute de son côté des conséquences ruineuses pour l’ensemble de la filière nucléaire française en cas d’abandon. Et puis n’oublions pas les Britanniques. Pour la nouvelle Première ministre Theresa May, un feu vert est crucial. Il faut montrer que les groupes étrangers sont toujours prêts à investir, en dépit du Brexit.
Faut-il s’alarmer pour l’avenir d’EDF ?
Oui, parce que si la situation d’EDF inquiète, ce n’est pas seulement à cause d’Hinkley Point, loin de là. L’entreprise doit déjà investir 50 milliards dans la rénovation des centrales françaises, ce que l’on appelle le grand carénage. Alors qu’elle subit la chute des prix de gros de l’électricité - 30% en un an – et la baisse de ses parts de marché en France. Ajoutez à cela le sauvetage d’Areva, ça commence à faire beaucoup. Le directeur financier, Thomas Piquemal, avait d’ailleurs tiré la sonnette d’alarme en mars, avec une démission fracassante. Au final, c’est l’Etat qui risque de devoir à nouveau mettre la main à la poche pour maintenir EDF à flot.
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