Belfort : le billard à deux bandes d'Alstom

France Inter
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Ce matin, François Hollande présidera une réunion sur l’avenir de l’usine d’Alstom à Belfort...

Ce qui frappe sur ce sujet de la fermeture du site, c’est la possible répétition au carré de ce qui s’est passé à Florange, mélange d’économie et de politique, avec pas mal d’hypocrisie. Le point saillant, c’est que droite et gauche sont d’accord pour tacler Alstom. Manuel Valls juge l’annonce de la fermeture inacceptable et Nicolas Sarkozy scandaleuse. En fait, chacun a ses raisons de monter au créneau. Le gouvernement a 20 % a des droits de vote, c’est compliqué pour lui d’expliquer qu’il ne savait rien. Nicolas Sarkozy voit là un moyen d’enfoncer François Hollande et l’ex-ministre Macron -qui se défend- et de rappeler que lui a sauvé Alstom il y a douze ans. Voilà le décor.

Pareille unanimité politique est rare : Alstom a donc tort ?

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Sur la forme, on ne sait pas si l’entreprise avait formellement averti les syndicats et l’État. Il semble que non. C’est critiquable. Mais cela fait plusieurs années que chacun sait que le site est en suspens. Le problème économique est simple. Alstom a douze sites en France, 9.000 salariés, mais le marché des TGV est mâture -comme on dit. On remplace des rames, mais c’est tout. Et à l’étranger, quand il y a des contrats, la fabrication se fait sur place. Par ailleurs, Alstom a perdu plusieurs commandes de locomotives, notamment une en août, pas assez compétitive. Sur Belfort, l’entreprise a donc voulu avertir qu’après 2018, le carnet de commandes était vide et qu’il fallait préparer les reclassements des salariés sur d’autres sites.

Mais, selon vous, une autre clé de lecture doit être introduite.

Oui, il y a ce qui se joue en coulisses, dont on ne parle pas beaucoup. Avec cette affaire, Alstom met un coup de pression sur l’État pour qu’il force la SNCF à acheter à Alstom et pas à d’autres les rames de l’énorme appel d’offres des RER nouvelle génération. L’entreprise cherche à assurer du travail à ses autres usines. La SNCF, elle, veut faire jouer la concurrence avec un fabricant espagnol et le canadien Bombardier, moins chers. Bombardier qui a d'ailleurs une grosse usine et un millier d'emplois en France ! Vous voyez, c'est un billard à deux bandes avec deux conclusions. Un : la direction de l'entreprise va perdre la main d'événements qui la dépassent. Deux : ce matin, une musique rassurante pour les salariés sortira de l’Elysée.

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