Vous commentez un mot prononcé hier soir par François Hollande dans l’affaire grecque : dignité.
Oui, le chef de l’Etat, au cours de sa brève déclaration à côté d’Angela Merkel, a eu cette phrase : « il y a urgence pour la Grèce et pour l’Europe ; c’est aussi une question de dignité ». Le mot est étonnant, placé à côté de ceux, plus habituels et prononcés aussi hier, de la solidarité nécessaire (entre pays européens) et de responsabilité (de chacun des peuples européens pour se prendre en charge doit faire ce qu’il faut). Dignité, je ne sais pas ce que voulait dire François Hollande. Mais le mot est juste, que tout cela se termine par un accord ou se termine par une sortie d’Athènes de la zone euro.
Oui, peut-être, mais à qui s’adresse le mot ?
Ecoutez, d’abord à l’Europe en tant qu’entité géographique et politique. Que cet ensemble de 19 pays dotés de la même monnaie n’arrive pas à régler les problèmes d’un des siens qui représente moins de 3% de sa population et de sa richesse, est indigne et ridicule aux yeux du monde entier. Cela fait approximativement 2.000 jours que la crise de la dette grecque occupe les esprits et la Une de l’actualité, que Washington, le FMI, la Russie, la Chine, regardent cela et nous donnent des conseils. Oui, il y a une question de dignité à décider une fois pour toutes.
Question de dignité aussi pour la Grèce...
On a beaucoup entendu depuis dimanche que les Grecs retrouvent leur dignité. On peut en discuter : voir des retraités de soixante-dix ans faire la queue pour retirer quelques dizaines d’euros parce que les banques sont à sec, ce n’est pas digne. Si le pays veut retrouver de la dignité, il devrait se battre pas seulement pour obtenir que sa dette soit effacée, mais aussi pour dire quel type de modèle économique il veut construire. Athènes conteste que les prêts européens et internationaux récents l’aient aidé puisqu’il s’agit de rembourser les déficits passés. En revanche, l’importance des fonds structurels du budget communautaire, qui ont financé routes, ponts, tunnels etc., n’est pas contestable : plus de 120 milliards entre 1981 et 2020. Un record là aussi.
Enfin, le mot dignité s’applique aussi aux dirigeants européens...
On ne compte plus le nombre des Eurogroupes de la dernière chance, des sommets européens ultimes, des jour J, des semaines clés et des nuits cruciales. Angela Merkel a fait une erreur colossale en début d’année en sous-traitant aux instances techniques des ministres des Finances le règlement de la nouvelle crise grecque avec Alexis Tsipras. C’est au niveau politique que cela aurait dû se passer dès le début. C’était une manœuvre assez indigne.
Votre conclusion ?
On verra ce soir si un compromis est possible entre les 10 millions de Grecs et les 327 millions d’autres Européens. Mais ce que l’on peut exiger, c’est que les décisions soient prises 1/ vite pour que l’on ne traîne pas encore des mois et 2/ dans la transparence, que tout soit sur la table, parce que le secret des négociations n’est plus de mise. Chaque Européen a le droit de tout savoir. Il a payé en stress et en argent trébuchant pour cela.
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