Jean Gandois, le détonnant patron et capitaine d'industrie, vient de disparaître à 90 ans...
Petit rappel : Jean Gandois avait dirigé des entreprises dans la métallurgie et la chimie des années 1970 jusqu'aux années 1990. Et puis il avait présidé le CNPF, qui est l'ancêtre du Medef.
Il pouvait être tour à tour méprisant et chaleureux. Lui qui avait licencié 100.000 salariés au fil de sa carrière rêvait d'une entreprise citoyenne et d'un climat social apaisé. Devenu patron des patrons, il s'était d'ailleurs efforcé de faire revenir la CGT à la table des négociations, au grand dam de ses électeurs.
Le moment le plus marquant de sa carrière : le 10 octobre 1997.
Ce jour-là, une grande conférence sur l'emploi réunissait les partenaires sociaux et les figures économiques du gouvernement Jospin.
Jean Gandois pensait avoir gagné sur l'essentiel à ses yeux : le gouvernement n'allait pas rendre les 35 heures obligatoires. D'ailleurs, il connaissait bien la ministre du Travail, Martine Aubry : quand il dirigeait le fabricant d'aluminium Pechiney, il l'avait embauchée comme directrice des ressources humaines.
Mais patatras ! Lionel Jospin annonce en fin de rencontre que les mesures 35 heures seront contraignantes. Gandois pique une colère sur le perron de Matignon en déclarant : « Nous avons été bernés ». Il démissionnera de la présidence du CNPF trois jours plus tard.
Que sont devenues les entreprises qu'il a dirigées ?
C'est frappant : les cinq firmes qu'il a dirigées n'existent plus.
Attention, on dirait une partie du vieux jeu vidéo Pacman.
Sacilor, Sollac et le belge Cockerill-Sambre ont été avalés par le groupe européen Arcelor, lui-même repris par l'indien Mittal.
Pechiney a été racheté par Alcan, un groupe canadien absorbé ensuite par l'anglo-australien Rio Tinto avant qu'un morceau ne redevienne français sous le nom de Constellium.
Et enfin les activités du chimiste Rhône-Poulenc ont été dispersées dans trois groupes : le français Sanofi, le belge Solvay et l'allemand Bayer.
Mais ce n'est pas seulement un échec, car il s'est passé la même chose dans toute l'industrie lourde en Europe, notamment pour cause de montée de la puissance chinoise.
Le commissaire européen Thierry Breton écrivait récemment dans « Les Echos » que « l'ère d'une Europe conciliante ou naïve est révolue. »
Jean Gandois, qui était un Européen convaincu, aurait sans doute applaudi - mais en demandant des preuves.
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