La baisse de 15 centimes le litre a beaucoup de défauts économiques, ne serait-ce que parce qu'elle est non ciblée. Mais il faut reconnaître que la situation est exceptionnelle, avec un prix des carburants en moyenne à plus de 2 euros.
Le premier ministre, Jean Castex, a donc annoncé une baisse de 15 centimes du prix des carburants. Une baisse de 15 centimes par litre à partir du 1er avril et jusqu’à la fin juillet. Commenter cette mesure est compliqué.
Avec ma seule casquette de journaliste économique, j’ai envie de dire que c’est du grand n’importe quoi.
- Aider tous les Français à payer leur essence, y compris ceux qui n’ont aucun problème de remplir leur réservoir, est étrange ; et le faire pour quatre mois alors qu’on ne peut pas savoir comment va évoluer la situation internationale paraît encore plus étrange. Pourquoi ne pas aider seulement ceux qui ont besoin qu’on les aide ?
- On a envie d’ajouter : à moins d’un mois de la présidentielle, Emmanuel Macron rajoute un euro dans la machine du quoi-qu’il-en-coûtisme électoral pour séduire les classes moyennes ; et si le pétrole augmente encore, faudra-t-il remettre 15 centimes de plus ?
- Enfin, sur le fond, est-ce à l’Etat d’amortir tous les chocs, comme si c’était un tiroir-caisse magique qui n’a rien à voir avec nous ?
Ecoutez-bien : la facture totale des mesures prises sur les prix de l’énergie s’approche des 30 milliards d’euros – avec cette somme gigantesque, tous les hôpitaux et toutes les universités pourraient être refaits.
Bref, on l’a compris, les bras du journaliste économique tombent.
Mais voilà, si le journaliste économique se hisse au-dessus de sa condition et réfléchit un peu socialement et politiquement, on voit bien que des pêcheurs laissent actuellement leurs bateaux à quai, que des routiers menacent de bloquer des dépôts et que certains Français ne peuvent plus rouler.
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On va l’apprendre à midi : la semaine dernière, pour la première fois, les prix des carburants ont dépassé la barre des 2 euros le litre en moyenne nationale.
Certaines enseignes (comme les centres Leclerc et Système U) afficheront aujourd’hui de fortes ou très fortes baisses techniques sur le gazole, mais la tendance reste à des prix élevés.
Donc, un avis mi-chèvre mi-chou ?!
Non, au total, ce type de mesure est inévitable mais un ciblage précis aurait été préférable. Elle suscite toutefois deux remarques. Un, si l’Etat dépense autant d’argent, c'est pour inciter les Français gros rouleurs à acheter des véhicules décarbonés que cette mesure serait le plus utile. Deux : si l’Etat est prêt à dépenser autant d’argent, il faudrait au moins le faire pour une autre bonne raison, en diminuant nos importations de pétrole russe afin que ce quoi qu’il en coûte ait aussi un sens.
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