Le monde de l’édition française est sous le choc, une youtubeuse de 22 ans s’est propulsée en tête des ventes.
Son pseudo, Léna Situations. Une énergie à vous bouffer tout cru, des conseils « bonne mine » plein sa collec de sacs à main et des vidéos vues par 1 gros million d’internautes. L’une des dernières s’intitule « Mais wesh ??? un livre !!! ». Oui, un livre. Enfin, un produit destiné à tous ceux qui la kiffent, habilement fabriqué par Robert Laffont et frontalement intitulé « Toujours plus ». Parution le 24 septembre.
7 jours après, tremblement de terre. En première semaine, Léna a vendu 22 500 exemplaires. Effarant. Je vous cite les seuls scores qui vaillent, les chiffres dits GFK, enregistrés aux sorties des caisses, pas de la com pipotée d’éditeur. 22 500. Au même moment, au rayon des livres pratiques, Cyril Lignac n’en écoulait « que » 15 000. 22 500 pour Léna. En littérature, ni Emmanuel Carrère, ni Joël Dickers n’ont fait récemment de semaine à plus de 17 000. Léna Situation s’est hissée au niveau d’un des plus gros faiseurs de best-sellers au monde, Ken Follet, un auteur installé depuis 30 ans. Hier, sont tombés les chiffres de la deuxième semaine. Le marché du livre retenait son souffle : 14 800 exemplaires. La gosse a écoulé plus de 37 000 bouquins en quinze jours. Bam !
Vous me direz, rien de nouveau sous le soleil. C’est une vieille recette de librairie. Les youtubeurs y succèdent aux stars de la télévision, qui succédaient eux-mêmes aux gloires du cinéma, qui succédaient aux fleurons du transistor. A chaque âge d’or médiatique, ses héros et ses nuées de fans à qui le son et l’image ne suffisent pas. Il faut un objet à toucher, à enlacer, à conserver. C’est d’autant plus opérant pour les youtubeurs dont la production est entièrement dématérialisée.
Les youtubeurs les plus suivis ont tous signé des livres : Enjoy Phoenix, McFly & Carlito, le Rire jaune, Fabien Olicard, Nota Bene, Bilal Hassani. Chacun dans son couloir : la grosse vanne, la beauté, l’Histoire, le mentalisme. Leurs livres fonctionnent comme des prolongements éditoriaux et des produits dérivés de leur chaîne. Or c’est là, précisément que les Youtubeurs réinventent le marché de l’édition : ils n’ont pas besoin de nous, les médias, pour vendre leurs ouvrage. Ils sont leur propre média, ils sont eux-mêmes des faits médiatiques. Ils ont conquis leur public clic après clic et s’adressent à lui en direct. Les journalistes ne servent qu’à chroniquer leurs succès. Ainsi, le sur-vitaminé « Toujours plus » fait-il mieux que le très ascétique « Yoga ».
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