L’Association des journalistes lesbiennes, gays, bi et trans constate l’absence des lesbiennes dans les débats sur la PMA.
On peut débattre de la question noire sans les noirs, de l’Islam en France sans les musulmans, du voile sans les femmes voilées et ainsi de suite... On peut toujours, parce que ces débats nécessitent une réflexion historique, morale et politique qui n’est pas réservée aux individus concernés : elle englobe l’ensemble d’une société en train de muter. De même, l’extension de la procréation médicalement assistée n’échappe pas à l’énonciation de principes universels à laquelle chacun peut et doit prendre part.
Mais bon, soyons honnêtes, discuter des reconfigurations éthiques, médicales et juridiques de la parenté en général et aborder spécifiquement la PMA ce n’est pas la même chose. La PMA pour toutes suppose de parler enfin du désir d’enfant et d’enfants déjà mis au monde par des femmes qui ne peuvent pas tomber enceinte naturellement, parce qu’elles sont célibataires ou homosexuelles.
Pour, contre, peu importe : comment nous faire un avis si cette réalité nous est toujours racontée de l’extérieur ? Si on ignore précisément celles qui le vivent et ce qu’elles vivent...
Le problème est d’autant plus aigu qu’il accentue un travers médiatique bien connu.
Statistique à l’appui, on interroge en 2018 beaucoup plus d’hommes que de femmes dans tous les médias. Quant aux femmes homosexuelles, elles n’y sont pas sous-représentées, mais quasi inexistantes. A l’image de notre société, d’ailleurs. L’homosexualité masculine s’affiche plus facilement. L’homosexualité féminine, elle, demeure cachée la plupart du temps. La PMA pour toutes les concerne pourtant directement. On ne les entend pas plus qu’avant. Bref, l’invisibilité des lesbiennes crève les yeux.
Et dans le débat sur la PMA, cette injustice médiatique devient une faille démocratique.
Vous me direz, il y a des gens, en France, qu’on autorise à s’exprimer uniquement sur des sujets réservés. Et c’est d’autant plus caricatural. La télévision vous montrera toujours une personne handicapée causant mobilité et accès à l’emploi. Jamais pollution ou pouvoir d’achat. Un couple lesbien, c’est pareil. Il ne surgit dans les JT que pour illustrer la PMA, comme si deux femmes qui vivent ensemble n’avaient pas autant de choses à dire que les autres sur la taxe d’habitation ou le prélèvement à la source !
C’est ça le sort médiatique d’une minorité discriminée. À l’image, exclue des sujets qui nous concernent tous. Dans les débats, exclue des enjeux qui les concernent eux.
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