Aquarius… Emmanuel Macron et Giuseppe Conte déjeuneront finalement ensemble. Mais la France s’est placée dans une situation délicate…
« Le choix en politique n’est pas entre le bien et le mal mais entre le préférable et le détestable », disait Aron. Pour Machiavel, «le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moins mal» … On sait (la chronologie) qui de Aron ou Machiavel a copié l’autre mais de toute façon, il s’agit d’une évidence… d’un dilemme de pouvoir quotidien, singulièrement pour un président français décisionnaire, bien seul, en dernier ressort… Sauf que sur la question de l’Aquarius, les maximes d’Aron et Machiavel n’opèrent pas. Enfin pas complètement. Sur un plan moral (si l’on peut encore utiliser ce mot sans se faire traiter de bien-pensant) et devant l’histoire, il n’y a pas, face à la question de savoir si la France pouvait proposer d’accueillir le bateau chargé de migrants, après le refus de l’Italie et de Malte, il n’y a pas de mauvaise et moins mauvaise solution… Il y en a une mauvaise et une bonne, limpide comme il en arrive rarement en politique. Paris ne l’a pas vu ainsi.
Ça c’est d’un point de vue moral… mais d’un point de vue purement politique alors ?
Il en va autrement. Là, les maximes d’Aron et de Machiavel sont vraies. Refuser explicitement le bateau aurait été, pour le Président, prendre un risque politique vis-à-vis de tous les humanistes de son camp au sens large, d’autant qu’il s’est fait élire plus contre le FN que pour son programme. Accepter le bateau, en revanche, aurait été risquer l’appel d’air (notion contestée mais très ancrée dans l’esprit notamment du ministre de l’Intérieur). Autre risque : exaspérer une partie de la population qui estime que la France subit déjà une vague migratoire trop importante et, par là même, renforcer l’extrême-droite. Donc là, effectivement deux mauvaises solutions. Mais quand vous êtes face à deux mauvaises solutions… pourquoi ne pas prendre celle qui correspond à votre identité politique. Et surtout, pourquoi ne pas prendre la plus humaine ? En réalité, dans cette situation, seules deux attitudes s’expliquent, s’approuvent ou se condamnent selon ce que l’on pense : celle de l’Italie, qui correspond à la logique qui a fait gagner la majorité actuelle. Et celle de l’Espagne, qui correspond à l’ADN politique et au discours habituel du PSOE (des socialistes) désormais au pouvoir. La seule attitude qui ne peut que provoquer des critiques, de partout, c’est celle qui consiste à ne pas choisir… A regarder ses chaussures et ensuite à commenter, même de façon pertinente, les décisions de ceux qui, eux au moins, en ont pris une. Emmanuel Macron, dont la principale qualité reconnue, est justement de ne pas tergiverser, d’agir promptement et clairement, aura loupé, ici, une bonne occasion d’être lui-même... Et d’ailleurs aussi à la France d’être elle-même ! Il faut ajouter un codicille aux maximes d’Aron et de Machiavel… Il y a, en politique, deux solutions : la mauvaise et la moins bonne, il y en a, en fait, une troisième, la pire de toutes : ne pas choisir entre les deux premières.
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