Hier matin, Henri Guaino, le conseiller spécial du Président, était sur Canal +. Et il a fêté, à sa façon, les 50 ans de la cinquième République en en caricaturant les défauts, c'est-à-dire la suprématie absolue de l'exécutif sur le Parlement. C'est un peu comme s'il soufflait sur les bougies en postillonnant abondamment sur le gâteau - ce n'est plus très appétissant. Pour évoquer les conséquences de la crise, le conseiller spécial a dit ceci : « les critères de Maastricht, qui prévoient un déficit sous les 3% du PIB ne sont plus la priorité » ! En gros, ça veut dire, « les prochains budgets seront gravement déficitaires... et on va alourdir la dette ». On s'en doutait un peu, mais si c'est réellement une analyse que partage le Président, alors il faudrait au moins en débattre, parce que de quoi parle le conseiller -d'autorité- conseiller qui ne représente aucun électeur et qui n'est responsable devant aucun parlementaire ? Il parle des critères de Maastricht. Alors sur le fond, il a peut-être raison même si la majorité pense plutôt le contraire. Là n'est pas la question. Il se trouve simplement que les critères de Maastricht ont été approuvés par référendum ! Ce n'est pas rien normalement pour un gaulliste. Depuis, les deux Présidents de la République qui ont été élus au suffrage universel, les 4 majorités qui ont été élues à l'assemblée, ont proposé des politiques qui étaient explicitement sensées s'inscrire dans les critères de Maastricht. Mais la situation a changé, on est en récession. Et c'est pour ça qu'il faut peut-être revoir les critères de Maastricht mais ça mérite débat, non ? Hé bien non, ça ne mérite pas débat. Henri Guaino l'a affirmé hier : « ce n'est pas le temps du débat, c'est le temps pour le pouvoir exécutif de prendre ses responsabilités » dit-il. Donc, la conception de la vie politique selon, Monsieur Guaino, est la suivante : le gouvernement agit, quitte à faire exactement le contraire de ce pour quoi il a été élu. Il agit et après seulement, on débat ! Vu comme ça, il ne fallait pas se fatiguer à réformer les institutions pour rééquilibrer les pouvoirs en faveur du parlement. Mais le temps presse, l'urgence c'est peut-être plutôt d'agir que de débattre. Agir ou débattre en démocratie ce n'est pas contradictoire. Les Etats-Unis ont, en deux semaines, discuté, consulté leur électeurs, fait remonter des interrogations, des préoccupations, parfois des exaspérations de tous les Etats. Qu'un pays qui compte 3 fuseaux horaires arrive en si peu de temps à organiser un débat parlementaire et plusieurs votes pour un sujet primordial démontre que c'est possible. Jean-François Copé, le Président du groupe UMP à l'Assemblée, s'est un peu ému des propos d'Henri Guaino. Il dit beaucoup en ce moment qu'il compte bien utiliser à plein les nouveaux pouvoirs du Parlement. C'est l'occasion. Les députés et sénateurs UMP sont réunis à Antibes. Face à la désinvolture démocratique du conseiller du Président, ils pourraient en profiter pour montrer que le temps des godillots est dépassé en demandant d'urgence un débat sur la situation économique puisque l'on parle de récession, il faudra choisir entre relance ou rigueur et éventuellement abandonner les critères de Maastricht. Ça se fait, ne serait-ce que vis-à-vis des électeurs qui ont voté 6 fois depuis 1992 pour approuver Maastricht ou des politiques encadrées par ces critères.
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