En ce 8 mars, vous nous parlez du vote des femmes.
Oui et ce qui est frappant c’est que, s’il y a une différence entre ce que votent les femmes et ce que votent les hommes (les femmes votent un peu plus à gauche), eh bien on peut en conclure qu’il n’y a pas, qu’il n’y a plus de vote des femmes pour autant ! Comment est-ce possible ? C’est tout simple, le fait d’être une femme n’est pour quasiment rien dans le choix partisan. Ce qui différencie les genres dans leur vote, c’est simplement la condition sociale, le niveau de vie et le secteur d’activité. Une policière a autant de chance de voter à droite qu’un policier. Et cette probabilité (chez les policiers) est supérieure à celle de voter à gauche. De la même façon, une institutrice a autant de chance de voter à gauche qu’un instituteur. La proportion des femmes dans la police est faible et la proportion de femmes dans l’enseignement est élevée… vous me suivez. Dans une même entreprise, le revenu moyen des femmes est inférieur à celui des hommes. CQFD. La différence de vote selon les sexes ne traduit plus que les inégalités sociales entre les hommes et les femmes. L’idée que les femmes votent moins aux extrêmes que les hommes s’atténue et est aussi largement liée à leur secteur d’activité. Il est donc le loin le temps où les femmes, souvent inactives votaient plus à droite que les hommes puisqu’elles étaient plus attachées à la tradition, n’étant pas directement liées au monde du travail qui était censé être celui des luttes et du progrès.
Et rappelons que les femmes n’ont eu le droit de vote qu’en 1944 !
Oui, il a fallu attendre le programme du Conseil national de la résistance et la Libération pour qu’un peu plus de la moitié de la population majeure de ce pays puisse enfin voter ! Sous la troisième République, la gauche et la droite s’étaient coalisées contre ce droit. Il faut relire les débats parlementaires de la première partie du XXème siècle sur ce sujet ! Proposé en 1906, 1919 et 1922, bloqué souvent par le Sénat, le droit de vote des femmes avait donné lieu à des débats édifiants. La droite conservatrice estimait que la femme n’était pas assez douée de raison et de jugement pour avoir un « avis apaisé » sur les affaires du pays. Elle voyait dans l’hypothèse de la capacité politique des femmes le ferment de la destruction de la famille. La discorde politique pourrait s’installer au sein du couple, minant l’autorité du mari. Une majorité de parlementaires craignait, avec l’apparition des femmes en politique, une « dictature des sentiments » qui nuirait à la virilité du Parlement et serait préjudiciable au moment de voter les budgets de la Défense. Les femmes sont aussi les premières à « attiser les querelles de clochers et colporter les ragots dans les campagnes », c’est bien connu… Elles ne peuvent donc pas être élus locales. On trouvait aussi des arguments sexistes chez les promoteurs du droit de vote des femmes… « Nous avons besoin de la grâce et de la douceur des femmes sur les bancs de l’Assemblée » disait un député radical lors du débat de 1919. La gauche, de son côté, freinait des quatre fers. Elle estimait que la femme était sous « la coupe des curés » et donc forcément de droite ! « Si les femmes votaient en Bretagne, les républicains seraient battus par les cléricaux » prévenaient certaines loges maçonniques. Tiens ! Cet argument destiné à priver une partie de la population de ce droit civique en raison de sa supposée soumission à une religion… ça vous dit quelque chose ? « Si les étrangers avaient le droit de vote aux municipales, il n’y aurait que de la viande halal dans les cantines »… voilà qui ne dépareillerait pas dans le débats de 1906, 1919 et 1922.
L'équipe
- Chronique