Retraites : la grève jusque dans les mairies ?

Des grèves jusque dans les mairies ?
Des grèves jusque dans les mairies ? ©Getty - Philippe TURPIN
Des grèves jusque dans les mairies ? ©Getty - Philippe TURPIN
Des grèves jusque dans les mairies ? ©Getty - Philippe TURPIN
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Est-il normal que des mairies ferment pour soutenir la mobilisation contre la réforme des retraites ? C'est un sujet qui a déjà fait polémique le 31 janvier, et qui refera polémique demain mardi. L’hôtel de ville est-il un service public comme les autres, qui implique un minimum de service ?

Le mouvement est peu suivi, mais il y a une semaine, plus d’une quinzaine de mairies ont fermé, avec sur certaines façades, des banderoles anti-réforme. En particulier dans des villes communistes, puisque c’est Fabien Roussel qui a lancé le mouvement. Le 24 janvier, il a dit aux maires : « prenez toutes les initiatives possibles ! » contre la réforme. Les associations d'élus n'ont pas suivi, mais le message communiste a été reçu 5 sur 5 à Paris, relayé par la socialiste Anne Hidalgo.

Mais attention aux raccourcis ! Qu'est-ce qu'on appelle "fermer" ? Le maire est d'abord un officier d'état civil. Autrement dit : actes de mariages, décès, naissance, ça continue. Ce qui ferme vraiment, à Paris, c'est juste une salle d'exposition et la boutique de l’hôtel de ville.

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Et chaque maire décline le mot d'ordre à sa façon... A Montreuil, le maire communiste coupe la journée en deux, pour que les agents puissent manifester l’après-midi. A Grabels, près de Montpellier, le maire LFI applique les retenues sur salaires aux agents grévistes, mais il donne toutes ses indemnités à une caisse de grève !

Et selon vous, une mairie ne devrait pas plutôt rester neutre ?

Soyons précis sur les textes : la loi de 2008 sur le service minimum ne mentionne pas les mairies. Ensuite, il est strictement interdit de rémunérer un agent municipal s’il est gréviste. En revanche, rien n’empêche qu’un accord de sortie de conflit, négociée, soit signé, plus tard, comme dans n’importe quelle entreprise.

Sur l’obligation de neutralité, enfin, c’est intéressant ! En 2005, la mairie de Sainte-Anne, une commune de Martinique, avait hissé le drapeau indépendantiste. Réponse du Conseil d'Etat : une mairie n'a pas à donner son opinion politique, religieuse ou philosophique.

Alors, comment ça va se passer demain quand la mairie de Paris va ressortir ses banderoles ?

C'est un jeu de dupes. Les élus jouent la montre ! Le temps qu’un juge soit saisi, en référé, la banderole est retirée, mais tout le monde l’a vue ! C’est aussi ce que fait Robert Ménard quand il ressort ses crèches de Noël…

La neutralité est théorique : quand deux ministres, deux ex-socialistes, Olivier Dussopt et Stanislas Guérini, disent qu'Anne Hidalgo confond sa mairie avec une annexe du PS… Ne sont-ils pas eux-mêmes en flagrant délit de contradiction, quand ils relaient, par mail, à tous les fonctionnaires, des vidéos de soutien à la réforme ? On nage en pleine hypocrisie !

Pourquoi ne pas assumer carrément, franchement ? Pourquoi les mairies de Pau et du Havre, François Bayrou et Edouard Philippe, n'ont pas de banderoles POUR la réforme ? Par peur d’être impopulaires ? Et si les banderoles agacent, ça se sanctionne, dans les urnes, en 2026.

Les mairies ne sont pas des préfectures. Il y a dedans une partie du coeur et du corps politique du pays qui bat et qui s'y exprime. On a suffisamment dit aux élus qu'ils étaient hors sol pour vouloir fustiger ceux qui se mouillent un peu trop bruyamment !