Le plan banlieues de Jean-Louis Borloo…
Alors depuis que je fais ce métier, j’ai couvert, puis commenté une dizaine de plans banlieues… Tous plus urgents, indispensables, plus Marshall (Patton maintenant) les uns que les autres…et je dois dire (sans doute une nature trop confiante) que j’y ai, à chaque fois, un peu cru. Parce que ces plans sont accompagnés de témoignages de maires de banlieues aux abois ! Les gouvernements jurent toujours qu’après tant de plans inappliqués, perdus dans les limbes de la complexité administrative, cette fois-ci le problème sera pris à bras le corps ! On se dit à chaque fois: là on a compris quand même toute l’énergie positive que l’on pourrait tirer de ces territoires si jeunes, si seulement des moyens y étaient injectés avec discernement. Les 4 derniers présidents y ont été de leurs envolées sur le sujet: Mitterrand (de « changer la vie » à Bernard Tapie ministre de la Ville), Chirac (la fracture sociale), Sarkozy (le plan Marshall), Hollande (tout pour la jeunesse) !
Tout n’a pas échoué quand même !
Non, toutes les banlieues des grandes villes ne sont pas ces zones de non droit régies par une économie parallèle. Bien des quartiers populaires offrent même à leurs habitants de toutes origines un accès possible à l’ascenseur social. Ce sont souvent les banlieues limitrophes des grandes villes, dans lesquelles une gentrification limitée par un fort taux de logements sociaux a créé le modèle de mixité propice à l’épanouissement relatif de nombreux habitants. Mais les quartiers dits «difficiles», souvent plus excentrés, faits de grandes barres d’immeubles, sont devenus des ghettos, des lieux d’apartheid où l’économie de la drogue et l’islamisme structurent la vie. Les travailleurs sociaux témoignent, par exemple de la désespérance des femmes qui subissent les lois terribles de cet univers masculin de repli que sont ces mondes de trafic et d’islamisme. Les témoignages des profs aussi sont édifiants. On les connaît par cœur depuis 20 ans ! Les noms de ces quartiers, Vaulx-en-Velin, le Mirail, le Franc-Moisin, les 4000, les Minguettes et tant d’autres font toujours l’actualité négative. A chaque plan, donc, on se dit « quand même, là, on est au bout de l’acceptable » et puis, rien… ou pas grand-chose. Chaque vague migratoire accroit la ghettoïsation, les acteurs publics regardent ailleurs, soit par incompétence, soit par égoïsme, comme ces villes riches qui préfèrent payer des amendes plutôt que de construire leur quota de logements sociaux, comme ces patrons qui ne respectent pas le taux d’apprentis qu’ils doivent embaucher, ou qui font de la discrimination à l’adresse, comme ces grandes écoles aux concours en forme de tamis social. Faut-il y croire cette fois-ci ? On est vacciné ! Mais si ce débat pouvait au moins casser l’idée reçue, fausse, selon laquelle la banlieue est sur-financée, en vain, par rapport aux autres territoires, ce serait déjà un début. L’une des seules politiques qui a marché avant de s’estomper dans un manque de volonté, c’est l’ENRU, le plan de rénovation urbaine, justement initié par JL.Borloo. Attendons ce que retiendra le gouvernement mais les premières prises de parole des ministres ne sont pas encourageantes… elles semblent déjà prendre leurs distances avec la fougue volontariste de l’ancien maire de Valenciennes !