Le débat sur le Roman national et l’enseignement de l’histoire est au cœur de la primaire de la droite…
Oui, ces thèmes sont centraux dans chaque discours des candidats de la primaire, chez Nicolas Sarkozy, JF Copé, Bruno le Maire et François Fillon. Ils estiment que l’apprentissage de l’histoire à l’école, trop influencé par l’esprit de 68, est un élément du délitement national qu’ils dénoncent. On aurait, pendant toutes ces années, fait la part belle aux tentatives d’explication, de contextualisation des faits historiques, au détriment de la chronologie (en réalité jamais vraiment abandonnée), et surtout au détriment du récit unificateur, du baptême de Clovis à la Résistance, avec ses dates et ses héros, Roland à Roncevaux, le valeureux Du Guesclin, le méchant évêque Cauchon, Marignan 1515, les braves poilus de 14. Les candidats de la primaire qui s’adressent au cœur électoral de la droite, plutôt âgé, lui proposent de revenir aux cours d’histoire de sa jeunesse ! C’est d’une efficacité de tribune redoutable pour faire vibrer d’émotion ceux qui était dans la force de l’âge pendant les trente glorieuses et qui, donc, sont si sensibles au « c’était mieux avant ».
Est-ce vraiment au pouvoir politique de s’intéresser aux programmes d’histoire ?
Il n’est pas anormal que les politiques s’intéressent à ce que l’on apprend à nos enfants dans une école censée être le lieu où se forment des citoyens. Mais former des citoyens c’est former à l’esprit critique autant qu’à un récit enjoliveur et glorificateur. Nicolas Sarkozy dit vouloir le retour des héros nationaux ? Mais lesquels, pour quel message ? Charles Martel ou Louise Michel ? Déjà le vieux débat, que l’on avait su dépasser, sur la place de la Révolution, ressurgit : JL Mélenchon dit hier, en écho, que le moment fort de notre histoire c’est 1789. Nicolas Sarkozy, lui, parle de l’histoire des rois, de l’empire et des républiques comme d’une continuité de la France éternelle. On est stupéfait de voir renaitre toutes ces controverses de nos grands-parents. L’histoire est une science humaine, pas un art romanesque et les enfants d’aujourd’hui, connectés, nourris aux réseaux sociaux et abreuvés par de multiples sources d’informations, ne sont pas ceux d’hier. On se demande si les enfants des candidats qui veulent le retour de l’uniforme à l’école, du roman national, sont élevés aujourd’hui ! Peut-être que leurs ados n’ont pas de smartphone, ne parlent pas à table, passent leurs loisirs à lire les classiques dans la collection Nelson ou à faire des herbiers ? C’est une constance, chez nous, dans ces moments, avant une élection présidentielle, on se gargarise de ce que nous avons été, on promet de le redevenir, faute de savoir imaginer l’avenir toujours plus angoissant. Chaque prétendant à l’Elysée pense concourir (techniquement il n’a pas tort) à la succession de Louis XIV, Napoléon et de Gaulle…Il devient obsédé d’histoire. De sa trace dans l’histoire ! Mais il est aussi le successeur de Dagobert, des rois oubliés et impuissants ou de Deschanel. S’écharper sur la façon d’apprendre l’histoire plutôt que de s’employer à avoir quelques prises sur l’histoire qui s’écrit sous nos yeux, ne serait-il pas l’une de nos pathologies politiques nationales ?
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