Les français et la corruption

Les français et la corruption
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Ce matin un sondage préoccupant réalisé pour Transparency International sur la perception par les Français de la corruption dans notre société.

Et le résultat de cette enquête est désastreux au 1er abord. Pour les Français sondés, les responsables politiques, les grandes entreprises, les médias, sont des havres de corruption. Les chiffres sont impressionnants : 77 % des sondés jugent les députés corrompus. 76% estiment qu’il en est de même pour les ministres. Les syndicalistes (64%) et les journalistes (58%) n’échappent pas à la vindicte populaire. Les seules personnes ayant du pouvoir, à propos desquelles les sondés ne sont pas majoritairement persuadés qu’elles sont corrompus, sont les maires (48%), les juges, les fonctionnaires nationaux et territoriaux, les militants associatifs (il y a quand même 34% des sondés qui répondent que les militants d’associations sont très ou plutôt corrompus) et enfin, les moins corrompus (avec 22%) les patrons de PME. En haut de l’échelle de la corruption, donc : les politiques. Mais attention pas l’Etat ! Ainsi pour une majorité de sondés, les fonctionnaires ne sont pas corrompus. La proximité compte dans l’appréciation de corruption : tout le monde connaît personnellement un fonctionnaire ou un patron de PME, un commerçant. Ils apparaissent donc comme les moins corrompus. L’éloignement, au contraire, favorise le soupçon : Une grande majorité de Français ne connait pas personnellement un ministre, un député ou même un journaliste. C’est donc une profonde crise de confiance, de représentation, un rapport vicié entre le peuple et le pouvoir sous toutes ses formes.

Qu’est-ce qu’être corrompu dans l’esprit des sondés ?

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J’ai posé la question à Jean-Daniel Levy, le concepteur du sondage chez Harris Interactive. La corruption, s’entend en termes de probité matérielle ou morale. Sont corrompus les élites, les détenteurs de pouvoirs ou de postes, qui ne travaillent plus pour l’intérêt général mais d’abord pour préserver leur situation. C’est donc

dans le cadre d’un sentiment de déclassement généralisé que l’opinion se défie de ce qu’on désigne par ce terme mal défini : « les élites », assimilés avant tout à des privilégiés, qui ont les moyens de se mettre à l’abri de la crise. Comment pouvons-nous analyser un tel sondage, en tant que journalistes, alors que 58% des Français nous estiment corrompus ! Nous pouvons ressentir ce sondage comme une injustice, mais en même temps on constate tous les jours (et ça nourrit nos chroniques, nos reportages) qu’une bonne partie du monde politique, du monde du pouvoir (et dans l’esprit de beaucoup de Français, nous y sommes assimilés) vit non pas dans un état de corruption absolue, mais, c’est vrai, dans une logique d’autoreproduction et d’auto-protection. Et d’ailleurs ce qui est intéressant (et peut-être rassurant) dans ce sondage, ce sont aussi les solutions plébiscitées par les Français pour retrouver la confiance. Elles ne traduisent pas un simpliste « tous pourris » puisqu’il ne s’agit pas de punir mais (pour 80% des sondés) d’instaurer un strict non cumul des mandats, y compris dans le temps. La clef, n’est donc pas le populiste « sortez-les tous » mais le raisonnable, « faites circuler, renouvelez, revitalisez la démocratie ».

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