Et maintenant les héritiers politiques de Michel Rocard : Manuel Valls et Emmanuel Macron ?
Oui, le point d’encrage rocardien communément admis (et sujet à caution, on en parlait hier) se trouve au centre gauche. Alors effectivement Valls et Macron (en terme de géolocalisation politique) apparaissent comme les héritiers ses plus évidents. Pourtant, il y a quelque chose qui cloche. N’essayons pas de déterminer qui détient le plus de gros morceaux de la vraie croix rocardienne, mais Manuel Valls, fidèle à l’inventeur de la 2èmegauche, depuis ses 18 ans, agit, à la tête du gouvernement à la limite de l’autoritarisme, parfois (au moins dans l’expression), loin de l’esprit de sa famille politique. Bien sûr Michel Rocard, en son temps a utilisé allègrement le 49.3, mais sa majorité n’était que relative. Manuel Valls pourrait rétorquer qu’il gouverne dans une période autrement troublée, sous la menace terroriste. Mais son républicanisme intransigeant, son jacobinisme, cette phrase malheureuse (et c’est vrai, regrettée plus tard) selon laquelle, tenter de comprendre c’est déjà un peu excuser, l’éloigne du rocardisme. Valls s’attache à incarner le retour de l’autorité de l’Etat, là où Rocard était particulièrement intéressé par la puissance de la société. Il montre aussi, que par-delà une fidélité certainement très sincère, il est désormais plus inspiré par Clemenceau, autre mentor, que par Rocard.
Emmanuel Macron est-il plus dans la lignée rocardienne ?
Il y a quelques indices qui pourraient en attester mais rien n’est moins sûr ! Certes, il promeut une société ouverte, et se dit plus attachés aux droits réels qu’aux droits formels. Lui aussi incarne une certaine modernité… Mais pour l’instant ce ne sont que des mots et surtout Michel Rocard –social-démocrate, pas social-libéral- était un militant, depuis le plus jeune âge, du socialisme démocratique (il en a voulu à Manuel Valls d’avoir envisagé de changer le nom du PS). Donc, en analysant les parcours et la pensée de Valls et Macron, on peut parler de Rocardisme hémiplégique. Rocard, lui-même, s’inscrivait dans le sillage de Pierre Mendes France, mais il avait adaptée cette pensée à l’esprit un peu libertaire, soixante-huitard des années 60 et 70. S’ils ne prennent pas tout du rocardisme ou du mendésisme, qu’est-ce que Valls et Macron apportent de plus ? Où est la petite lumière d’utopie qui brillait chez Rocard ? Ils sont, (époque oblige peut-être) plus soumis au rythme effréné de la société, dans l’essoreuse de l’actualité qui empêche de réfléchir à l’avenir. Rythme qui terrorisait Michel Rocard… On attend de ces deux-là, puisqu’ils se disent héritiers d’un inventeur, d’un défricheur de progrès, qu’ils proposent, à leur tour, une vision plus évidente du progrès pour le XXIème siècle. Mendes, Rocard, Valls… Mendes, Rocard, Macron ! La continuité ne saute pas encore aux yeux. Et même, concernant –par exemple- l’écologie, la réflexion sur une nouvelle croissance adaptée à l’impératif environnemental, Rocard, 85 ans, paraissait plus imaginatif et moderne que ses deux successeurs attitrés qui semblent accablés, à vouloir sauver ou adapter un modèle, plutôt d’en imaginer un autre !
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