Immigration : le gouvernement propose l’instauration de quotas. Ce n'est pas la première fois. Ils sont toujours promis, jamais instaurés.
J’ai fait une recherche dans un peu plus 10 ans de chroniques ! Et figurez-vous que depuis 2008, j’ai consacré 7 éditos au sujet. Les quotas. Ça m’a facilité l’écriture de celui d’aujourd’hui ! Toujours promis, jamais instaurés.
Concept brandi en campagne ou dans ces moments critiques pour des exécutifs aux prises avec le plus pernicieux des reproches : l’impuissance, la perte de maîtrise. Alors on ressort à droite (et donc maintenant à LREM) les quotas. Ça ne dure qu’un temps... celui de constater l’inintérêt opérationnel du concept. A moins d’être l’Australie ou le Canada (c’est-à-dire géographiquement isolés) ou une dictature à l’économie fermée et administrée, c’est impossible à mettre en place.
Mais en terme d’annonce, les quotas pour l’immigration, c’est un placebo d’autorité temporaire, facile, superficiel et pas cher. ‘Quota’, petit mot parfait, court, simple, mathématique, objectif donc. Petit mot qui exprime le terrible bon sens : la France n’acceptera, pour le bon fonctionnement de notre économie, que les étrangers dotés d’une qualification, d’un savoir-faire, d’un métier dont nous avons besoin. L’avantage du concept (le seul en fait) est de signifier que l’Etat reprend les choses en main... qu’il maîtrise (ou tout du moins qu’il se donne les moyens de maîtriser) la situation.
Et c’est faux ?
Ben oui. Pierre Mazeaud, gaulliste respecté, avait été chargé par le ministre de l’Intérieur de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux –en 2008- de faire un rapport sur la meilleure façon de mettre les quotas en place, promesse de la campagne 2007. Pierre Mazeaud livre ses conclusions en 2009. Il fallait se rendre à l’évidence. Aucun spécialiste de l’immigration n’a été surpris. Citons le rapport : "des quotas migratoires contraignants seraient irréalisables ou sans intérêt". Voilà, c’est clair !
Et même si ça avait marché, l’immigration purement économique ne représente que 11% de l’immigration légale... donc fin du concept. Qu’à cela ne tienne, pour sauver la face, on instaure alors des ‘quotas non contraignants...’ c’est-à-dire que l’on établit des statistiques par métier (pas par nationalité) pour voir quels sont pans de l’économie sous tension et pour mieux orienter la délivrance des visas. Soit. Le gouvernement, aujourd’hui, ne fait que proposer de réactualiser et d’affiner la détermination des secteurs sous tension.
Foin de quotas, seul le mot sera utilisé. En réalité les quotas non contraignants sont un instrument d’ouverture intelligente des frontières et non pas de fermeture. Mais il est assez symptomatique de l’époque et de l’état d’esprit paniqué de la majorité sur cette question. L’exécutif n’assume pas d’actionner un instrument d’ouverture et préfère jouer avec le sens du mot ‘quota’ porteur d’une illusoire fermeté.
Voilà Edouard Philippe (qui au sein de l’UMP) s’était toujours opposé à Nicolas Sarkozy, sur cette façon justement bravache et vaine de faire de la politique à coups de menton et d’autorité de moulinets... le voilà obligé de singer l’ancien président. Je ne sais plus comment tourner les chutes de mes éditos sur ce thème... c’est un peu toujours pareil : à la louche, c’est bon pour Marine Le Pen...
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