Macron : "La métaphore Alpine et scabreuse"

France Inter
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La métaphore alpiniste d’Emmanuel Macron…

Oui le président, pour justifier de moins taxer les plus riches, afin qu’ils puissent investir et créer des emplois, a utilisé une métaphore inspirée de Frizon-Roche : «Si l'on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée c'est toute la cordée qui dégringole» dit-il_._ Cette image est-elle révélatrice de la vision des rapports de classes d’Emmanuel Macron ? A la décortiquer, on s’aperçoit qu’elle n’est pas très heureuse. D’abord pendant une ascension, la cordée est une hiérarchie immuable. Le 1er reste le 1er et le dernier le dernier, quoiqu’il arrive. Le 1er de cordée trace la voie, trouve les prises, plante les pitons. Il est le seul à décider puisque de là où il est, il est le seul à pouvoir juger de l’état de la paroi. Et surtout, si la réussite de l’escalade (et même la vie de tous les suivants) dépend du 1er, l’inverse n’est pas vrai. Il n’y a pas d’interdépendance. Le 1er de cordée n’a pas besoin des autres. Et même, sans le reste de la cordée, il irait plus vite. Les suivants (les employés) sont une responsabilité, un poids, un risque. D’ailleurs, pour monter plus haut, parfois le premier de cordée-patron doit se délester de quelques suivants. Il licencie et les ordonnances vont accroître cette « agilité ». La métaphore alpine d’Emmanuel Macron est hasardeuse mais ce n’est qu’une image et il serait facile d’extrapoler. En politique, la métaphore conduit souvent à la sur-interprétation ou à la torsion du sens à des fins critiques. C’est une arme à double tranchant, aisément utilisable par l’adversaire. 

Emmanuel Macron, se démène pour réhabiliter l’image des patrons…

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Et pour cela il abuse de stéréotypes : les syndicalistes « foutent le bordel », « sont fainéants », si l’on travaille, on peut se « payer un costard ». Voilà qui laisse croire que si les riches sont riches c’est toujours qu’ils le méritent ! Comme si le niveau de vie, à l’heure de la financiarisation de l’économie et de la reproduction sociale, dépendait de la sueur, de l’effort et de l’ardeur au travail ! C’est étonnant comme parfois le Président peut se caricaturer lui-même, alors que sa politique se veut équilibrée. Il développe certes une fiscalité favorable aux patrons mais ne baisse pas l’impôt sur les successions, impôt juste car philosophiquement anti-reproduction sociale. Il développe aussi des instruments de responsabilité des patrons, avec le projet de sur-taxation des contrats courts et précaires, d’intéressement pour les salariés. Une chose est certaine, au vu de ses métaphores, il n’y a plus de surmoi socialiste chez ce président qui vient de la gauche. Pour utiliser une métaphore sans se tromper en politique, il faut qu’elle soit simplissime, n’ait qu’une seule interprétation possible. Certains usent du procédé jusqu’à l’absurde. On se souvient –pour rester dans le registre alpin-  de JP Raffarin : « la route est droite mais la pente est forte ». J’en propose une autre (montagnarde aussi), c’est une citation d’un célèbre alpiniste, Gaston Rébuffat. Je l’offre à Emmanuel Macron. Elle va bien à son histoire : "L'alpiniste est un homme qui conduit son corps là où, un jour, ses yeux ont regardé... »

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