Emmanuel Macron à la télévision hier pour retrouver l’équilibre…
C’était le but. Combattre cette idée selon laquelle la réforme du code du travail est faite pour les patrons et le budget est pour les riches ! Plusieurs fois le président a parlé de « philosophie » de son action pour lui redonner un sens, un but : « Libérer et protéger ». Deux mots si généraux qu’ils auraient pu être prononcés par tous ses prédécesseurs. C’est donc l’acception macronienne de ces mots qu’il fallait repréciser. Libérer, on a bien compris, c’est libérer les PME pour fluidifier l’économie, libérer les capitaux, ne plus les surtaxer pour les garder en France. Le problème vient plus du second mot : protéger. Emmanuel Macron tente de convaincre que la meilleure protection ce n’est plus le statut de l’employé mais la formation qu’il reçoit… la formation à tout âge pour s’adapter au monde. C’est la théorie des droits réels moins statutaires que les vieux droits formels qui ne protègent plus. Pour qualifier la philosophie de son action le président cite une philosophe… Simone Weil et ses « garanties effectives », autre terme pour les droits réels. Le problème de cette théorie (contestée d’ailleurs) c’est qu’il ne peut s’agir -pour ceux qui sont concernés-, que d’un pari ! Et ce pari commence par bénéficier aux seuls plus aisés. Il était donc nécessaire de présenter à nouveau l’équilibre des choses, en affirmant que maintenant venait le temps des réformes qui illustrent le second mot : « protéger ».
Le président assume d’autres mots, «fainéant», «bordel»...
Oui parce que d’abord il n’est pas du style à reconnaître publiquement une bêtise (c’est un défaut) mais en l’occurrence il fait l’analyse (sans doute vraie) que ces mots n’ont vraiment choqué que ses opposants les plus farouches à gauche… et qu’après tout, il n’est pas de mauvaise politique que de les assumer, tant qu’à faire, pour illustrer l’énergie et la passion… Mais il faut souligner une particularité peu glorieuse de la politique française, liée au statut du président : le premier ¼ d’heure de l’entretien a été consacré à la communication du chef de l’Etat… Parle-t-il trop ? Pas assez ? S’exprime-t-il avec les mots qui conviennent ? Le reste a servi basiquement à définir, redéfinir, son action, son sens, son but, à nous assurer qu’il s’agissait d’une politique équilibrée. Parce que décidément ça ne va pas de soi ! Ce besoin constant de clarification, jamais vraiment assouvi, vient du fait que l’ambiguïté s’installe très vite dans notre débat politique. Pour une raison simple : on ne voit jamais le président (comme c’est le cas pour les chefs d’exécutif des démocraties voisines) s’expliquer avec de vrais contradicteurs, en situation de vrai dialogue forcément clarificateur. Le constant monologue très sécurisé du président, que permettent nos institutions (puisque il n’est pas responsable devant l’assemblée), contredit l’idée de la fluidité et de l’ouverture qu’Emmanuel Macron prône par ailleurs. L’émission d’hier, expéditive dans le cadre écrasant de l’Elysée, malgré le talent des journalistes, ne fait pas exception. Ce n’est pas tant la rareté de la parole présidentielle qui pose problème que son statut et l’impossibilité de la questionner vraiment au moment où elle est prononcée.
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